#1 [↑][↓]  07-07-2021 16:40:46

Henry
Copilote
Lieu: Côtes d'Armor
Date d'inscription: 19-11-2010

[Réel] ArchéoAéro Essai Cessna 140 par J. Noetinger (1951)

Bonjour

Suite à la sortie du C140 par Aeroplane Heaven, j'ai recherché dans mes archives un essai de cette avion paru dans le n°33 d'Aviation Magazine du 1er septembre 1951 et effectué par Jacques NOETINGER, pilote civil et militaire puis journaliste, membre du GIFAS et commentateur de meeting, et j'en passe. (8200h de vol sur 172 appareils).
On lui doit entre autre l’appellation "Patrouille de France" de la patrouille de l'armée de l'air.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_N%C5%93tinger

Depuis sa création, Aviation Magazine publiait chaque mois un essai d'avion léger par Jacques Noetinger.
J'ai pensé que certains d'entre vous pourrait être intéressés en particulier par le descriptif des performances constatées à l'époque et les conseils de pilotage.
Vous remarquerez que la description de la planche de bord diffère un peu de celle d'Aeroplane Heaven mais est similaire à la photo publiée par Barstormer.
A noter également le petit paragraphe concernant l'absence d'horizon artificiel pour le vol de nuit.

La première partie comporte le descriptif de l'avion et la seconde le récit des vols.

Le scan de la revue étant peu agréable à lire sur un papier vieux de 70 ans, j'ai utilisé un logiciel de reconnaissance des caractères pour copier le texte et repris l'ensemble car c'était loin d'être parfait castet
En espérant ne pas avoir laissé d'erreur

Pour les photos par contre....excusez la qualité mais c'est d'époque hmm

Bonne lecture
https://i.goopics.net/800/nr08Q.jpg
https://i.goopics.net/800/9P8yq.jpg

AVIATION-MAGAZINE publie, d'autre part, le compte-rendu du voyage dont j'ai été l'un des bénéficiaires aux Etats-Unis Au cours du stage de pilotage que nous avons pu faire sur le terrain de Champaigne, j'ai eu la possibilité de prendre sérieusement en main plusieurs type d'appareils, mais parmi ceux-ci, certains ont déjà fait l'objet d'articles dans ces colonnes. Par contre, je n'ai pas manqué de prendre des notes sur les machines qui sont moins courantes en Europe, ou même inconnues.
Ayant déjà décrit les Cessna 195 et 170 je pense que le lecteur trouvera quelque intérêt à comparer ces deux appareils au Cessna 140 biplace, couramment utilisé aux Etats-Unis pour l'école et pour l'aviation privée. Tous les élèves français ont eu la chance d'être lâchés sur cet appareil et je ne crois pas trahir leur opinion en disant que, parmi la variété de ceux qu'ils ont piloté ici le 140 a été leur préféré, encore qu'ils aient apprécié le Piper Pacer mais ils ont trouvé celui-ci plus délicat au décollage et à l'atterrissage compte tenu du fait qu'il est difficile à tenir au pied en ligne droite au sol et à l'approche du sol. Son fuselage court provoque ce petit inconvénient.

Mais, revenons au Cessna 140, dont plusieurs exemplaires sont utilisés à l'institut aéronautique de l'Illinois. Lorsqu'ils sont rangés aux cotés du 170, il faut une certaine habitude pour différencier un modèle de l'autre tant ils se ressemblent. La construction du nouveau 140 est identique à celle du 170 avec ce revêtement en alclad qui donne cet aspect de métal parfaitement poli. Par contre le modèle précédent avait un revêtement d'aile en toile. Il m'est facile ici de comparer les deux versions puisque sur la piste l'un et l'autre modèles figurent dans "1'écurie" de notre école. Sur l'ancien modèle le phare d'atterrissage pend sous l'aile et les mâts en V se rejoignent à la cabine ; deux contrefiches verticales assurent également la rigidité de ces mâts. Dans le nouveau modèle, comme sur le 170, chaque aile comporte un mât unique, sans contrefiche,  et le phare d'atterrissage est noyé dans le bord d'attaque de l'aile gauche.
Une caractéristique permet de différencier à distance le 170 du 140, il s'agit de la dérive. Sur le 170 elle est prolongée vers l'avant d'une sorte d'arrête arrondie qui vient rejoindre le dos du fuselage; sur le 140, le bord d'attaque de la dérive est rectiligne et est incliné de 45 degrés environ par rapport a la verticale. Enfin, alors que le Cessna 195 possède une glace sur la partie avant du plafond sur toute la largeur de la cabine, le 170 n'en possède pas et le 140 est doté de deux glaces en longueur faisant à peu près toute la profondeur de la cabine.
Le Cessna 140 est doté d'un train a lames de ressort Wittman. Il peut être, à la demande, équipé du train cross+wind mais, ici, celui-ci n'est pas utilisé. Cet avion est équipé d'un moteur Continental de 90 CV entraînant une hélice métallique fixe. La roulette de queue est conjuguée avec le palonnier.
Une porte de chaque côté donne accès à la cabine, chacune d'elles s'ouvrant par le même système de poignée extérieure que l'on trouve sur le 170 et les glaces s'ouvrent de part et d'autre suivant le même principe de levier que pour le quadriplace ; la porte de droite peut être verrouillée par un loquet intérieur.

La cabine, très confortable, n'est pas extrêmement large mais elle est bien calculée et l'on y est bien assis pour bénéficier au sol d'une très bonne visibilité. La glace avant est haute et le capot moteur descend légèrement. Le même système d'aération que sur le 170 permet une climatisation de cette cabine. Le dossier unique des deux sièges est réglable à sa base en profondeur et en inclinaison grâce au verrouillage à quatre crans. Ce dossier, complètement rabattu vers l'avant, dégage un coffre à bagages de dimensions raisonnables, surmonté d'une large tablette sur laquelle on peut accumuler pas mal de petits bagages encore.
Le dessus du tableau de bord comprend deux poignées donnant un point d'appui pour monter à bord, chaque élément du train étant doté d'un petit marchepied. Malgré ces facilités on ne peut pas dire que l' accès au poste de pilotage soit aussi parfait qu'on pourrait le souhaiter car le mat gène un peu. Un cendrier figure derrière ces poignées.
Au centre, et légèrement surélevé, se trouve le compas. Les principaux instruments de vol sont groupés sur la même ligne et sur toute la largeur de la cabine. De gauche à droite on trouve le branchement du microphone, celui des écouteurs étant sur le panneau latéral gauche de la cabine, mais un haut-parleur étant dissimulé dans le plafond il est largement suffisant pour toutes les réceptions radio. Le contact, à clé, est à côté de cette connection du micro. Viennent ensuite le badin,   la bille-aiguille, l’altimètre, au centre le conservateur de cap, deux cadrans non utilisés et le compte-tours. Cet ensemble constitue le panneau principal sous   lequel figurent, de gauche à droite, deux postes radio (1'un est le VHF et radio compas. l'autre donne les beams et la radiodiffusion) la pompe à injection, la place inutilisée d'un instrument, l'ampèremètre, la manette du mélange, un autre instrument libre, le réchauffage du carburateur, l'unique manette des gaz, qui se trouve au centre, la commande des freins du parking , une commande de réchauffage de la cabine, le démarreur et allume-cigares électrique.
Sous le tableau, à extrême droite un bouton permet d'allumer et de régler l'intensité   de l'éclairage du tableau de bord, en vol de nuit.
Enfin alignés en bas de tout ce tableau, six petits contacts métalliques sont, de gauche à droite, le contact général, le contact radio, le contact électrique de la bille et de l'aiguille, le contact des feux de position, une manette non utilisée et le phare d'atterrissage.

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Comme on peut le constater, cet équipement est complet, mais je suis surpris de constater une fois de plus que, comme sur la plupart des appareils utilisés à l'Institut aéronautique de l’Illinois, on ne trouve pas d’horizon artificiel, bien qu'ici le vol de nuit soit courant. Je reste persuadé qu'il s'agit pourtant là d'un instrument extrêmement précieux et qui simplifie bien le travail du pilote. Ne pas l'utiliser est certainement un bon entraînement mais il existe... Pourquoi ne pas s'en servir? J'allais oublier de signaler la présence d'un indicateur de décrochage à klaxon.

Pour terminer cette description de la cabine, ajoutons que les jauges à essence figurent dans l'emplanture des ailes, à l'intérieur de la cabine, et que chaque réservoir d'aile contient 10,5 gallons, soit 34 litres approximativement. Le sélecteur d'essence de trouve sur le plancher devant l'angle gauche du siège de droite. Ce sélecteur à quatre positions permet de couper le circuit, de brancher individuellement chaque réservoir ou de les brancher simultanément. Faisant pendant à cette commande, sur le plancher figure, devant l'angle avant droit du siège de gauche, le flettner de profondeur, sous forme d'une roue verticale flanquée d'un index gradué mécanique. Entre les deux sièges, un levier à quatre crans donne les quatre angles de braquage possible des volets. Ce levier est doté, à son extrémité d'un bouton poussoir de verrouillage.
Les palonniers sont, tous deux, du même type à pédales plates, avec freins par pression sur la partie supérieure. Les deux manches sont des volants trapézoïdaux s'enfonçant dans le tableau.

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Pour mon premier vol sur cet appareil, je suis accompagné par le moniteur Hal Tiensley qui m'aide à extraire le 140 du hangar. Depuis ce matin, il tombe une pluie torrentielle sur le terrain et nous profitons d'une accalmie relative pour prendra place à bord. Je suis en place gauche et lui, avec son calme habituel, s'installe à droite. Ceintures de sécurité fixées, je mets le contact général, mélange sur riche sélecteur d'essence branché, deux injections avec la pompe, un peu de gaz, contact des magnétos et le moteur part. Doucement, je commence à rouler sur la piste     de circulation appréciant une fois de plus la souplesse due aux trains Wittman. La roulette conjuguée et les freins très doux permettent de manœuvrer le 140 avec une parfaite précision, sans la moindre difficulté d'autant que la manette de gaz est douce et que la visibilité est excellente. J'effectue mon premier décollage sur la piste avec un vent de côté assez fort et irrégulier et fais aussi trois tours de piste,   en me posant et en redécollant sur l'herbe. La première impression que je ressens est que l'avion répond très bien et que son aile haute lui donne une bonne stabilité mais ces tours de terrain ne me laissent pas le temps de prendre des notes et j'attends le lendemain de voler seul pendant une demi heure pour me faire une idée précise des performances du Cessna 140 qui, par ailleurs, est très bien dessiné pour donner à l'équipage une très bonne visibilité en vol. J'apprécie en particulier, les glaces supérieures qui, dans les virages, permettent de ne pas voler à l'aveuglette comme c'est si souvent le cas sur les appareils à aile haute.
L'atterrissage lui aussi avec ce train et cette roulette de queue si souples qui font que, même sans faire un atterrissage parfait, on ne ressent aucun choc. Sans exagération, je crois pouvoir dire que l'atterrisseur Whittman est le meilleur     que j'ai jamais en l'occasion d'utiliser sur un avion léger. Par contre, sa souplesse a tendance à faire rebondir l'avion si l'atterrissage trois points n'est pas parfait. Il est donc facile de se rendre compte quand on a réellement réussi celui-ci.
Mais voici que Jesse Steonecipher, notre chef moniteur, vient de me confier le 140 qui va me permettre d'étudier celui-ci avec soin. Au petit comptoir du bureau des opérations, on me désigne "mon" avion, c'est le N.1112D . Je le trouve au parking. Pas de mécanicien. Ici on monte dans son avion comme dans sa voiture, personne ne s'en étonne.
Je le libère des chaînes qui l'arriment au sol. Je grimpe à bord, je mets les contacts, le moteur tourne et je vais prendre ma piste. Point fixe avant de décoller, je prends ma vitesse et à 40 mph au badin, je suis en l’air (64km-h). Il n’y a pas de variomètre au tableau de bord, il m'est donc difficile d'apprécier la vitesse ascensionnelle à 60 mph au badin (100 km-h.) mais en 4' 25" je suis à 1000 mètres d'altitude, sans avoir cherché à tirer le maximum de l'avion, A cette altitude je me mets en ligne de vol à 2.550 tours et la vitesse indiquée au badin est 105 mph. Avec la correction altimétrique, ceci fait un confortable 175 kilomètres-heure. Je m'amuse ensuite à faire quelques virages sans toucher au manche. La bille reste pratiquement au milieu et, en virant à gauche, d'avion perd un peu d'altitude, à droite beaucoup plus. Inversement je répète le même exercice à l'aide du manche, mais sans palonnier. La bille s'écarte un peu du centre mais reste stable.
Ensuite, j'aborde les pertes de vitesse, d'abord sans volets. Avec moteur, le klaxon     se fait entendre lorsque le badin indique moins de 30 mph (50 km.-h), sans moteur à 30 mph exactement. Avec les volets, je ne puis donner de chiffre car, avec moteur et pleins volets, le klaxon ne retentit que lorsque le badin est en dessous de zéro.   Sans moteur il indique un peu plus mais comment interpréter une indication aussi vague ? L'appareil doit décrocher aux alentours de 30 km-h. Ce qui importe surtout, c'est que l'abattée est très douce, dans les conditions d'un atterrissage, que le nez se baisse lentement, que l'avion n'a aucune tendance à partir sur un côté et qu'il se rattrape de lui-même.
Je termine ma prise en mains par une série de lazy eights que j'effectue avec des écarts de badin allant de 140 à 40 mph (225 à 65 km-h). La conjugaison des commandes est facile et, à aucun moment, il n'est nécessaire de développer le moindre effort sur le manche ou le palonnier.
  Cette fois, je réduis un peu pour perdre mon altitude et venir faire deux atterrissages. Pour le premier, je fais une approche à 70 mph (115 km-h), ce qui est trop. Je fais un long palier, la vitesse tombe et je me pose trois points à 40 mph (65 km.-h). Je redécolle immédiatement, refais un tour de piste et me repose sur la piste en ciment après une approche de 100 km -h, mon palier est plus court. Je fais un atterrissage très doux à moins de 50 km.-h., pleins volets. Je dois dire que, hier, j'avais fait trois atterrissages sans volets et que l'arrondi est plus simple avec pleins flettners et pleins volets. Il ne faut pas hésiter à bien tirer le manche pour faire un bon atterrissage.
Je reviens au parking, réenchaine l'avion... et vais faire "pointer" mon vol au bureau des opérations .
Je suis ravi de ce vol qui complète ma connaissance des productions Cessna et je comprends pleinement la vogue de cette série d'appareils aux Etats-Unis et au-delà du nouveau monde.

https://i.goopics.net/800/eY3e0.jpg
Photos Robert Ayers, moniteur à L'institut aéronautique de  l'Illinois ( USA )

Dernière modification par Henry (07-07-2021 19:41:04)


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#2 [↑][↓]  07-07-2021 17:40:13

philouplaine
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Re: [Réel] ArchéoAéro Essai Cessna 140 par J. Noetinger (1951)

Bravo Henry,
Un grand merci pour cet article très vivant et très intéressant ... notamment à propos des qualités de vol et de son décrochage à très très basse vitesse!
Philippe


ouaf ouaf ! bon toutou !!

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#3 [↑][↓]  26-07-2021 14:37:31

philouplaine
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Re: [Réel] ArchéoAéro Essai Cessna 140 par J. Noetinger (1951)

Le Cessna 140 vu des Etats-Unis


Bonjour chers amis PiloteVirtuelistes,

Pour faire suite au post d’Henry, j’ai pensé à tenter de trouver aussi quelque chose sur le Cessna 140 dans la presse américaine de l’époque. Voici un article de la revue FLYING sur cet avion.

Il s’agit aussi d’un vol d’essai, aussi par un pilote-journaliste très connu dans les USA de l’époque. Il ne s’agit pas moins du pilote fondateur de l’Association des Pilotes Privés des USA, M. Max Karant.

C’est un article paru en juin 1946, soit donc un an après le premier vol du Cessna 140. D’ailleurs le journaliste-pilote de FLYING va voler sur le prototype, car aucun avion de série à cette époque n’est encore disponible. Lire les deux articles, le français de Jacques Noetinger (quel pilote !) et l’américain me semble pouvoir autant vous intéresser que moi.

Vous noterez les différences sur les centres d’intérêt et les similitudes frappantes entre ce qu’estiment les deux auteurs-pilotes de leur vol d’essai. Notamment à propos de l’horizon artificiel, très important pour les pilotes français de l’époque et totalement secondaire pour les pilotes américains d’alors ... M. Karant n’en parle même pas.

Vous noterez le prix incroyablement bas d’un Cessna 140 à l’époque (un peu moins de 3000 dollars, soient seulement oserais-je dire, 40 000 dollars d’aujourd’hui ... quand on sait qu’un 172 vaut la bagatelle de 400 000 dollars ...). D’ailleurs Cessna va rafler les parts de ce marché en vendant en quelques petites années près de 7700 exemplaires de cet avion !

Allez, je vous laisse : bonne lecture ! Les illustrations sont celles de l'article original.
Philippe




Le Cessna 140
par Max Karant,
FLYING Magazine, numéro de juin 1946


Max Karant, le plus célèbre défenseur des droits des pilotes privés, fondateur de l'Aircraft Owners and Pilots Association (AOPA) (NdT – AOPA pour Association Des Propriétaires d’Avions et des Pilotes. C’est la principale organisation américaine de pilotes privés. Les quatre objectifs de l’AOPA tels qu’inscrits dans ses statuts sont d'améliorer la sécurité de l'aviation générale, d'accroître le nombre de pilotes, de préserver et d'améliorer les aéroports communautaires et de donner une image positive de l'aviation générale) et du magazine "Pilot", la publication officielle de cette organisation qui compte déjà 364 000 membres.


Note de la rédaction
Ceci est le deuxième article d'une série destinée à aider le pilote et le futur propriétaire d'un avion à évaluer les appareils actuellement sur le marché. L'avionneur nous fournit généralement l'avion à tester, mais il n'a aucun contrôle sur les opinions émises ou publiées ici. Les lecteurs sont encouragés à commenter cette nouvelle rubrique.



https://nsm09.casimages.com/img/2021/07/26//GQZhMb-small-image-en-tete.jpg
Image d'en-tête de l'article


Cessna a l'intention de s'emparer du marché des avions légers avec cet avion léger de luxe et son homologue plus simple, le 120. Si le constructeur de Wichita est capable de produire, de distribuer et d'assurer le service après-vente de ces deux modèles à grande échelle comme il le prévoit actuellement, le 140 et le 120 seront bien plus connus dans le monde de l'aviation générale que ne le sont un certain nombre d'anciens avions légers célèbres, actuellement sur le marché.

Le 140 et le 120 sont fondamentalement le même avion. Le 120 (vendu à 2,495 $ chez Whichita) est 500 $ moins cher que le 140 (vendu à 2995 $ chez Wichita). Il n'a pas les volets, le démarreur, le générateur, la cabine insonorisée de luxe ou les instruments supplémentaires du 140, il devrait donc être un bon avion économique, bien qu'il ait les mêmes performances brutes  que le 140. Comme il est plus léger que le 140 (350 kg à vide contre 365 kg pour le 140), il peut transporter une plus grande charge utile.

Les deux modèles sont entièrement métalliques, à l'exception des ailes qui sont entoilées. Ils sont tous deux propulsés par le moteur 4-cylindres Continental de 85 chevaux qui pèse 81 kg et tourne à 2575 tours/min. Les deux modèles sont équipés des nouvelles jambes de train d'atterrissage monobloc en acier à ressort brevetées par S.J. Wittman, célèbre pilote de course d'Oshkosh, Wisconsin. Les nouveaux Cessna 170 et 190, qui sont des développements entièrement métalliques de l'Airmaster d'avant-guerre, qui lui était entièrement entoilé, seront également équipés de ce nouveau train d'atterrissage. Les 170 et 190 ne diffèrent que par leurs moteurs ; l'un sera équipé d'un moteur Warner, l'autre d'un Jacobs.

Je me suis donc récemment rendu à l'usine Cessna de Wichita, Kansas, pour voler sur le 140. Bien qu'il soit généralement  préférable que les vols d'essai publiés dans FLYING soient effectués dans des avions choisis au hasard, le seul Cessna 140 qui pouvait voler à ce moment-là était le prototype, le NC-41684. Ma première impression à la suite de ces vols d’essai est que si les 140 de production se comportent aussi bien que cet avion, alors Cessna peut être fier de son produit.


https://nsm09.casimages.com/img/2021/07/26//GQZhMb-small-image-1.jpg

Traduction de la légende. Avion entièrement métallique, à l'exception de l'aile qui est entoilée, ce Cessna 140 ne diffère de son homologue d'entraînement, le 120, que par la présence d’un volet de bord de fuite. Le pare-brise et les fenêtres de la cabine sont en plexiglas, ce qui améliore la visibilité.


Le vol d'essai pour FLYING sur le 140 a été effectué depuis l'aéroport Cessna de Wichita (altitude 1400 pieds au-dessus du niveau de la mer). La température était de 20° C, le point de rosée de 3°C, le calage altimétrique de 2999, et le vent de 15 km/h soufflait du 270°. Au décollage, notre poids brut était de 646 kg, soit 14 kg de moins que le poids maximum. Mon compagnon de vol était Don Flower, le directeur des ventes de Cessna.

Pour vérifier la vitesse de croisière du 140, un parcours de trois kilomètres avec deux étapes, une vent debout et une vent arrière, a été décidé. Le parcours vent debout a été effectué à 540 pieds au-dessus du sol  à 2450 tours/min de puissance. La vitesse mesurée a été de 167 km/h. Le parcours vent arrière a été effectué à 420 pieds et à nouveau 2450 tours/min, la vitesse mesurée a été de 200 km/h. Cela donne une vitesse moyenne de 183 km/h. La publicité de Cessna annonce une vitesse de croisière de "plus de 160 km/h", et les responsables de Cessna ont insisté sur le fait qu'ils n'annonceraient que 169 km/h. Pour eux,  mon chiffre de 183 km/h était trop élevé. Pourtant, c’est ce que j’ai obtenu avec un avion à presque pleine charge.

Le 140 a d'excellentes caractéristiques de décrochage. En utilisant la puissance du moteur mais sans les volets, j'ai fait monter l'avion en flèche et je l'ai maintenu jusqu'à ce qu'il décroche, la vitesse indiquée était alors de 68 km/h. Sans le moteur et sans les volets, le Cessna 140 a décroché à 80 km/h dans mes mains. Avec les volets sortis et le moteur coupé, le 140 a atteint la vitesse d'atterrissage annoncée par Cessna, soit 66 km/h. J'ai été capable de maintenir l'altitude à une vitesse indiquée de seulement 88 km/h et 1450 tours/min de puissance.

Même lorsqu'il a complètement décroché, le 140 présente toujours un excellent contrôle aux ailerons, malgré le fait que l'aile ne soit pas équipée de becs d’attaque. Le nez tombe droit devant, mais pas du tout de façon abrupte. L’abatée du décrochage est douce. On m'a dit que l'avion peut se mettre en vrille, mais c'est très difficile, le pilote d’essai de Cessna a dû forcer l'avion à le faire. La CAA (NdT – La CAA est l’ancêtre de la FAA) stipule pourtant que le 140 ne doit pas "partir en vrille avec les volets sortis". Un désaccord apparent entre le constructeur et l’agence de régulation.

La maniabilité en l'air est exceptionnellement bonne. Toutes les commandes sont équipées soit de roulements à billes, soit de roulements à aiguilles prélubrifiés, plus résistants aux tensions et plus souples que les classiques roulements à bille, ce qui fait du 140 l'un des avions les plus faciles à manœuvrer. L'assiette de vol du 140 se règle très facilement ; l’empennage est équipé d’un aileron compensateur de profondeur actionné par une petite roue verticale en contreplaqué située juste à droite du siège du pilote et près du plancher. Le volet compensateur  est grand et donc sensible, l'avion réagit rapidement à de légères rotations de la roue. Les gouvernes de roulis et de direction sont fixes.

La visibilité en l'air est à peu près normale pour un monoplan à aile haute. Elle est excellente vers le bas, les côtés et l'avant. Mais même si le 140 possède deux rectangles verts transparents dans le toit de la cabine, la visibilité au-dessus et derrière n'est pas très satisfaisante. Un rétroviseur grand angle encastré, comme ceux utilisés sur nos chasseurs de l'armée et de la marine, permettrait de réduire les zones aveugles typiques d'un avion à aile haute. Le 140 et le 120 sont équipés de Plexiglas sur tout le pourtour de la cabine, ce qui constitue une grande amélioration par rapport à certains plastiques bon marché qui fatiguent les yeux et qui se rayent si facilement, tellement utilisés dans les avions légers aujourd'hui.

Le volet du 140 lui confère un angle de descente prononcé, ce qui est une excellente caractéristique lors d'un atterrissage, notamment du point de vue de la visibilité. Le volet peut être abaissé à une vitesse maximale de 130 km/h. Il est actionné par une longue poignée qui se trouve entre les deux sièges et que l'on tire vers le haut pour abaisser le volet. J'ai eu un peu de mal à m’habituer à cette poignée je l’avoue. Elle est verrouillée en position en tournant la poignée vers la droite jusqu'à ce qu'elle s'enclenche, ou vers la gauche pour libérer le volet. J'ai essayé cette poignée sur plusieurs 140 et 120 et j'ai constaté qu'il fallait toujours la manipuler avec une attention particulière afin de s'assurer que le volet reste dans la position désirée. Une simple poignée à verrouillage positif, comme certaines de celles utilisées sur les automobiles, serait plus satisfaisante. Lors de quelques atterrissages, j'ai eu la désagréable surprise de voir le volet du 140 rentrer soudainement parce que je n'avais pas tourné la poignée correctement. Cependant, le 140 s'est révélé alors être une très agréable surprise à cet égard : une rétraction soudaine du volet lors d'un atterrissage ou d'un décollage, ce qui ferait blanchir les cheveux d'un pilote dans plus d’un autre avion, a eu très peu d'effet sur le 140. L’abattée qui en a résulté était à peine perceptible.

Lors de plusieurs atterrissages, j'ai délibérément mis l'avion en palier assez haut  au-dessus de la piste afin de le laisser retomber durement sur son nouveau train d'atterrissage en acier au chrome vanadium. Le choc fut violent et je m'attendais  à ce que l'avion rebondisse immédiatement dans les airs. Au lieu de cela, le train d'atterrissage montra à chaque fois une tendance prononcée à amortir un tel atterrissage dur.  Je n'ai pu faire rebondir l'avion que lorsque je poussais à fond le manche vers l'avant. Mais ce nouveau train d'atterrissage supporte apparemment tout ce que l'avion lui-même peut supporter. Les ingénieurs de Cessna m’ont dit qu’ils avaient hissé une cellule de 140 dans un hangar à une hauteur incroyable, et qu’ils l’avaient lâchée d'un coup pour voir ce que le train d'atterrissage supporterait en cas de chute brutale. On m'a dit que le train d'atterrissage s’est aplati jusqu'à ce que le fuselage heurte le sol. Ensuite, le train d'atterrissage a repris sa forme initiale sans aucun dommage apparent.


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Traduction des légendes. À gauche : Le capot moteur s’ouvre sans aucun outil, il peut être démonté de l’avion sans avoir à retirer l’hélice. À droite : Un seul boulon maintient chaque jambe de train d'atterrissage en acier en place sur le fuselage du Cessna.


Il ne fait aucun doute que ce nouveau train d'atterrissage est un atout indéniable. J'ai fait rouler le 140 rapidement sur un terrain accidenté, je l'ai fait tourner brutalement et j'ai freiné brusquement jusqu'à ce qu'il s'arrête en dérapant. Dans toutes ces conditions, le train d'acier s'est révélé exceptionnellement solide et stable. Les nouveaux freins Goodyear sont excellents et sont actionnés "par les orteils" avec les pédales du palonnier. Pour actionner le frein de stationnement, il faut appuyer fortement simultanément  sur le haut des deux pédales du palonnier, puis tirer sur une petite manette située sur le tableau de bord jusqu'à ce qu'il s'enclenche et maintienne les freins verrouillés. Cette manette, cependant, est de la même taille que celle utilisée pour mettre ne route le chauffage du carburateur et d'autres accessoires similaires et j'ai eu du mal à déterminer quand les freins étaient vraiment verrouillés et jusqu'à quel point il fallait tirer cette manette. Une fois, je me suis tellement évertué à tirer sur cette manette pour être vraiment sûr que le frein de parking était enclenché que je l’ai arraché du tableau de bord. Là aussi, je préférerais une poignée de frein de stationnement bien plus simple comme celle qu’on trouve dans une automobile.

La manœuvrabilité au sol est excellente pour ce type d'avion à train classique. En plus de la stabilité inhabituelle pour un avion léger du train principal comme on vient de le voir, la roue de queue orientable et les excellents freins se combinent pour donner au 140 une très bonne manœuvrabilité au sol. De plus, j’ai trouvé la visibilité vers l’avant pendant le roulage supérieure à la moyenne sur un avion à train classique.

La cabine du Cessna140 devrait plaire autant aux femmes par sa beauté qu’aux hommes par son utilité. La disposition des instruments est bien pensée et efficace en vol. Il y a deux grandes boîtes à gants, celle située devant le siège de droite pouvant être utilisée pour la radio si le propriétaire le souhaite. Dans les modèles Cessna 140 et 120, il n’y a pas le commutateur d'allumage conventionnel d’installé. La mise en route du moteur se fait en deux temps.


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Traduction de la légende. L'aménagement de la cabine du Cessna 140 est attrayant. Depuis que cette photo a été prise sur le prototype du 140, les volants ont été inversés sur les avions de série, avec le volant orienté vers le bas  plutôt que vers le haut. Les commandes de palonnier de freinage sont combinées. Le dossier du siège bascule complètement vers l'avant pour permettre de ranger les bagages.


L'interrupteur principal est d’abord mis en marche, puis les deux commutateurs des magnétos sont actionnés avant de démarrer le moteur.

Le 140 dispose d'un haut-parleur pour sa radio ; il est installé dans le plafond de la cabine, derrière les sièges. Cependant, le bruit dans la cabine de l'avion que j'ai piloté était tel que nous devions utiliser les écouteurs pour entendre clairement la tour de contrôle. Il se peut que la radio non standard installée dans le prototype du 140 que j'ai piloté n'ait pas un volume suffisant. Cessna affirme que l'installation de marque General Electric dans les avions de série est tout à fait satisfaisante.

Les bagages sont placés dans un compartiment important situé directement derrière les sièges. Le dossier des sièges est articulé vers l'avant, de sorte que les bagages peuvent être mis en place ou retirés facilement. Le siège du pilote lui-même est réglable.

Les ingénieurs de Cessna ont fait un excellent travail sur l'accessibilité à la maintenance du 140. Le capot moteur, par exemple, peut être ouvert des deux côtés sans même un tournevis. Si des travaux importants doivent être effectués sur le moteur, le capot peut être complètement retiré sans avoir à enlever l'hélice bipale, qui est une Sensenich à pas fixe.

L'équipement standard du 140 comprend un badin, un altimètre, un ampèremètre, un compas, une jauge de carburant, des indicateurs de pression et de température d'huile, un indicateur de vitesse ascensionnelle, un carburateur avec filtre à air, une batterie, des commandes doubles, un générateur, des feux de navigation, un démarreur, une roue arrière orientable, des freins hydrauliques, un manchon chauffant de carburateur, un phare d'atterrissage placé dans l’emplanture de l’aile, un frein de parking, un tableau de bord monté sur amortisseurs et des volets.

Dans l'ensemble, les Cessna 140 et 120 devraient être considérés avec attention par tout acheteur potentiel d'un nouvel avion léger dans cette catégorie particulière. Il faut espérer qu'en attendant, les responsables de Cessna trouveront des noms pour leurs nouveaux avions ; de simples numéros, comme 140 et 120, sont ternes et peu attrayants. Leur nouvel avion léger pourrait bien s'appeler le "Challenger", car c'est exactement ce que les 140 et 120 seront pour leurs concurrents.

FIN


ouaf ouaf ! bon toutou !!

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#4 [↑][↓]  26-07-2021 21:29:29

Henry
Copilote
Lieu: Côtes d'Armor
Date d'inscription: 19-11-2010

Re: [Réel] ArchéoAéro Essai Cessna 140 par J. Noetinger (1951)

Merci Philou pour cette recherche et cette traduction.
L'entoilage des ailes sur les premiers modèles a laissé place à un revêtement métallique 5 ans plus tard.
Cet écart de 5 ans entre les 2 essais explique peut-être la différence d'intérêt pour l'horizon artificiel. Etait-il si répandu en 1946? Je vais essayer de faire quelques recherche à ce sujet.
Sinon, l'évaluation des caractéristiques de vol et des qualités de l'appareil se ressemblent. L’engouement pour le train d'atterrissage également.
Il serait intéressant de savoir ce qu'en pense ceux qui ont piloté l'appareil s'il y en a parmi nous?


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