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Bonjour chers amis,
Il y a quelques jours, une cérémonie s’est tenue en Inde : le départ à la retraite du dernier Iliouchine Il-38ASM de la marine indienne.
En voici le récit qui, j’espère, vous intéressera.
Bonne lecture !
Philippe
LE RETRAIT DES ILIOUCHINE IL-38 MET FIN A TOUTE UNE EPOQUE DE L’AERONAVALE INDIENNE
Le retrait des Il-38SD May de la marine indienne met fin à une époque illustre passée à utiliser des avions chasseurs de sous-marins de fabrication soviétique.
Par Angad Singh, The War Zone, 9 novembre 2023
Le 31 octobre 2023, la marine indienne a clos un chapitre important de son histoire en retirant le dernier de ses avions de patrouille maritime Il-38SD, mettant ainsi fin à près d'un demi-siècle d'utilisation de cet appareil de fabrication soviétique au-dessus de l'océan Indien.
Un avion de patrouille maritime Il-38SD de la marine indienne au-dessus de la base aéronavale INS Hansa à Goa. © Angad Singh
Le premier escadron de reconnaissance maritime à long rayon d'action (LRMR) de la marine indienne, le 312 "Albatros", comprenait à sa fondation cinq avions Lockheed L-1049 Super Constellation de l'ancienne armée de l'air indienne (et avant cela, de la compagnie aérienne nationale Air-India). Le312ème escadron de l’aéronavale indienne a été fondé le 18 novembre 1976, sur la base aéronavale INS Hansa à Goa, dans l'ouest de l'Inde. Il s'agissait du premier escadron de patrouille à terre dépendant de la marine après près de deux décennies de lutte avec l'armée de l'air indienne pour le contrôle de la puissance aérienne maritime. Lorsque le gouvernement indien décida de soutenir la marine sur la question des avions de patrouille maritime, les autorités indiennes comprirent très vite que les "Super Connies" étaient des avions vraiment vieillissants qui n'étaient plus adaptés à la tâche, et elles commencèrent aussitôt à chercher un remplaçant plus moderne.
Un Lockheed L-1049 Super Constellation de la marine indienne conservé au musée naval indien de Goa, en Inde. © Alec Wilson
Après avoir évalué le Hawker Siddeley Nimrod, le Breguet Atlantique et l'Iliouchine Il-38 (co,nu sous sa désignation OTAN de "May"), la marine opta, plus ou moins forcée par le gouvernement indien, pour l'appareil soviétique, car il était nettement moins cher à acquérir et qu’il entrerait en service plus rapidement, puisqu'il était déjà construits puisque directement prélevé sur les stocks de la marine soviétique.
À la fin de 1976, les premiers équipages de la marine indienne allèrent à Riga, alors dans la Lettonie soviétique, pour un entraînement de conversion sur Il-36, et trois Il-38 furent peu de temps après remis officiellement à l’Inde qui les incorpora dans l’escadron de patrouille maritime 315, les "Winged Stallions", qui avait été créé à Goa le 1er octobre 1977. Deux autres appareils rejoignirent l'escadron plus tard, portant le nombre total des Il-36 en service dans la marine indienne à cinq en 1983.
Cette même année, la marine retira ses Super Connies et chercha à les remplacer aussitôt. Le choix le plus évident, celui d’autres Il-38, n'était pas envisageable car la production de ce type d'appareil avait pris fin en 1972 et la marine soviétique n'était plus disposée à s'en séparer. Moscou proposa alors le successeur de l'Il-38, le Tu-142MK (OTAN "Bear" qui est la version de patrouille maritime du Tu-95. Après une courte période de négociation, un contrat fut signé en 1985 pour huit appareils, les livraisons devant commencer en 1988.
Le dernier Tu-142 de la marine indienne effectue un passage avant son retrait lors d’un show aérien en Inde, le 29 mars 2017. © Angad Singh
Un Tu-142 Bear indien au repos sous le ciel nocturne. Contrairement aux Il-38 et aux P-8I, les Tu-142 ont passé la totalité de leurs 29 années d'existence à l'air libre. Aucun hangar n’était suffisamment grand pour les accueillir. © Angad Singh
À cette époque, la principale base aérienne de la marine, l’INS Hansa, abritait cinq unités : trois escadrons de patrouille maritime, une unité d'entraînement sur avion à réaction et un escadron de British Aerospace "Sea Harrier" embarqué à bord d’un de ses porte-avions. Afin de libérer de l'espace, la marine décida de construire une nouvelle base aérienne sur un terrain désaffecté datant de la Seconde Guerre mondiale, dans le hameau endormi d'Arakkonam, sur la côte est. L’endroit fut fortement remanié, avec notamment la construction de la plus longue piste d'atterrissage de l'Inde, à 4 500 mètres (près de 15 000 pieds). La nouvelle base aéronavale, flambant neuf, accueillit ses premiers occupants début 1992. C’est en mars de cette année-là que la base fut officiellement mise en service sous le nom d'INS Rajali, et l'escadron de patrouille maritime 312 quitta Goa pour Rajali en avril 1992.
L’équipement de l’Il-38, son radar de recherche de sous-marins, son détecteur d'anomalie magnétique (MAD), les torpilles et les grenades sous-marines de son armement permirent aux militaires indiens de suivre et de poursuivre les sous-marins depuis les airs. Ses quatre turbopropulseurs Ivchenko AI-20M produisaient plus de 4 225 chevaux chacun au décollage et, avec une pleine charge de carburant de plus de 33 000 litres, l'avion avait une autonomie de plus de 12 heures. Cependant, la durée typique d’une mission était de huit heures en moyenne.
L'équipage standard d’un Iliouchine il-38 comprend, sur une composition typiquement soviétique, un pilote, un copilote, un mécanicien navigant, un navigateur, un signaleur de vol et deux à trois opérateurs des capteurs électroniques.
Un mécanicien au travail sur l'un des quatre turbopropulseurs Ivchenko AI-20M de l'Iliouchine Il-38. © Angad Singh
Deux opérateurs au travail à bord d’un Il-38 indien. Le 315ème escadron de patrouille maritime a accueilli sa première femme d’équipage en 2012. Plus d'une décennie plus tard en octobre 2023, on en compte désormais trois dans l’aéronavale indienne. © Angad Singh
Outre leur rôle désigné de reconnaissance maritime à longue portée et de lutte anti-sous-marine (LRMR/ASW), les Il-38 indiens ont coopéré avec l'armée de l'air indienne pour diriger depuis les airs des frappes antinavires menés par l’armée de l’air indienne sur des vieux English Electric Canberra, puis menées ensuite par des SEPECAT Jaguar d'attaque maritime.
Pour les opérations de recherche et de sauvetage, les appareils de l’escadron 315 assuraient une couverture 24 heures sur 24 avec un préavis de quatre heures. Ces avions pouvaient transporter le canot pneumatique Rakshak (littéralement le Protecteur) indien conçu pour sauver jusqu'à 85 personnes. À partir d'avril 1990, dans le cadre du projet Yaduvansh (nommé d'après le premier aviateur naval indien, qui avait commencé comme pilote de Hellcat de la Seconde Guerre mondiale dans la Royal Navy britannique), la marine indienne et l'avionneur public Hindustan Aeronautics ont intégré le missile antinavire Sea Eagle à l’armement des Il-38.
Contrairement à son aîné, le Tu-142 n'a jamais eu d'arme air-surface vraiment opérationnelle, bien que le missile Sea Eagle ait été testé à plusieurs reprises sur cet appareil mais sans succès. La charge des Tu-142 comprenait des bouées acoustiques différentes et la torpille APR-2E au lieu de l'AT1ME qu’on trouvait à bord des Iliouchines. Les capacités du Tu-142 étaient largement comparables à celles de l'Il-38. Même l'endurance en altitude était similaire, bien que le Tu-142 le fasse avec trois fois plus de carburant pour alimenter ses moteurs Kuznetsov NK-12, de vrais monstres toujours assoiffés. C’étaient les turbopropulseurs les plus puissants de l'histoire.
Un Tu-142 décolle juste devant la tour de la base aéronavale INS Rajali dans l’est de l’Inde. © Angad Singh
Le poste de pilotage du TupolevTu-142 est spartiate, même s'il est plus facile à piloter que l'Iliouchine Il-38 qui, lui, est entièrement manuel. © Angad Singh
Les deux types d’avion patrouilleur soviétique ont été largement utilisés par l’Inde dans la région de l'océan Indien. Au début de son histoire, l'escadron 315 a joué un rôle essentiel dans la localisation de l'épave du vol 855 d'Air India, un Boeing 747-200B qui s'était abîmé dans la mer d'Oman au large de Bombay en janvier 1978. L'escadron a ensuite mené des missions de recherche et d'observation au cours de l'opération Pawan, l'intervention militaire indienne au Sri Lanka dans les années 1980, tout en étant crédité de la détection du navire détourné MV Progress Light au cours de l'opération Cactus au large des Maldives en 1988. Les Il-38 indiens ont également beaucoup volé dans le cadre de l'opération Swan visant à sécuriser les approches maritimes de la côte indienne dans les années 1990.
Les Tu-142, introduits dix ans après les Il-38, ont participé à diverses manœuvres nationales et internationales dans les années 1990, notamment pour l'exercice Malabar entre les États-Unis et l'Inde en mai 1995, auquel participait l'USS Pasadena, un sous-marin à propulsion nucléaire de la classe Los Angeles. Les appareils de l’escadron INAS 312 ont également été déployés lors du conflit de Kargil, dit la guerre des glaciers, en juillet 1999 avec le Pakistan et lors de l'impasse militaire avec le Pakistan en 2001-2002. Les Tupolev ont également participé à de nombreuses actions de lutte contre la piraterie, notamment une opération largement médiatisée pour venir en aide à un navire marchand chinois à quelques centaines de kilomètres de la côte indienne en mai 2011. En mars 2014, un Tu-142 a été l'un des premiers à participer à l'opération de recherche et de sauvetage du vol MH370, bien qu'il ait été rapidement remplacé par un biréacteur Boeing P-8i Poseidon de l’aéronavale indienne qui fut momentanément déployé sur la base aérienne de Subang, en Malaisie, pendant une semaine, avant de rentrer chez lui.
Même le plus banal des atterrissages d’un Tu-142 est un événement. © Angad Singh
Un Tu-142 de l’aéronavale indienne très usé retourne sur l'aire de trafic après une demi-journée de patrouille au-dessus de l'océan Indien. © Angad Singh
Bien entendu, la lutte anti-sous-marine est le quotidien de ces avions, mais leurs capacités opérationnelles spécifiques sont rarement rendues publiques. Des reportages périodiques et des conversations officieuses ont toutefois montré que les Iliouchine et les Tupolev détectaient et suivaient régulièrement les sous-marins qui entraient et sortaient de la zone de responsabilité internationale tout autour du sous-continent indien. Les performances des capteurs étaient apparemment très élevées, et toutes les données recueillies au cours des patrouilles étaient examinées et analysées pour s'assurer que les informations restaient à jour et pertinentes.
Des mises à jour régulières des systèmes de capteurs sont en effet essentielles pour que ces appareils soviétiques restent efficaces, en particulier au cours de leurs dernières années de service actif. La flotte de Tupolev a fait l'objet de modifications continues pendant la majeure partie de son service dans la marine indienne, les mesures de soutien électronique et les équipements de mise en réseau ont constitué des ajouts notables à partir du début des années 2000.
Les Il-38 ont bénéficié d'une mise à jour plus complète du système Sea Dragon, comprenant plusieurs nouveaux systèmes - un radar à synthèse d'ouverture inverse moderne pour remplacer l'ancien modèle soviétique, un système de bouées acoustiques remanié, une tourelle électro-optique jour/nuit montée sur l’avant de l’avion, un équipement de soutien électronique très performant (qui est logé dans la "couronne" distinctive au sommet du fuselage au-dessus du cockpît) et un nouveau système informatique central pour relier tous ces éléments entre eux.
L’Iliouchine il-38SD de série IN307, fut le dernier Il-38SD à voler pour la marine indienne, pour son dernier vol il passe ici sous le feu des canons à eau. © Angad Singh
La modernisation de l'Il-38SD comprenait également une révision complète et une prolongation de la durée de vie de la cellule, ainsi qu'un nouveau missile antinavire, le Kh-35 (AS-20 Kayak). Le premier avion ainsi modernisé (le n° de série IN305) a volé en 2003, et les livraisons en série ont commencé en 2006. Au cours des dernières années, les Il-38 ont également reçu des mises à jour de leurs réseaux et une suite d’améliorations sur les communications intérieures (COMINT) appelée Sarvadhari.
Au milieu des années 2010, les deux appareils ont été dotés d'un équipement unique, à savoir un conteneur logistique largable par voie aérienne, capable de livrer jusqu'à 110 livres à des navires en haute mer. Les Il-38 ont reçu un conteneur amélioré de 331 livres au cours des années suivantes, ce qui leur a permis de bénéficier d'une plus grande flexibilité.
Outre les modifications russes et indiennes, certaines mises à jour sont venues de sources improbables. La plus puissante d'entre elles était un radar de recherche de surface israélien IAI-Elta. Installé pour la première fois sur les Dornier 228 de la marine en 2001, il a été installé sur les Tu-142 à partir de 2006, puis sur les Il-38 à partir de 2015. Les équipages sont unanimes dans leur approbation du radar israélien et insistent sur le fait qu'il a été plus que rentabilisé en peu de temps. En fait, les performances sont si impressionnantes que les équipages des P-8 Poseidon l’envient, ce qui n'est pas peu dire de la part des opérateurs des avions de patrouille les plus récents et les plus avancés de la marine indienne.
Les immenses abris en forme de tente sont un ajout relativement récent de la base INS Hansa et ont considérablement amélioré la capacité d'entretien des avions. © Angad Singh
Toutes les bonnes choses ont une fin cependant, et après que le premier P-8I de la marine indienne ait été mis en service dans l’escadron 312 en 2013, le début de la fin a sonné pour les avions vieillissants de l’ère soviétique, à commencer par les Tu-142. La dernière révision du Tu-142 a été effectuée en août 2014 à l'usine de Taganrog en Russie, après quoi les avions ont commencé à être retirés au fur et à mesure qu'ils atteignaient les limites d'heures de vol de leur cellule et de leur moteur. Fin 2016, seuls deux Tu-142 étaient encore en état de vol et la marine indienne a confirmé que les Tupolev seraient retirés après l'exercice annuel TROPEX de préparation opérationnelle, prévu en janvier 2017.
Marquant la fin de l'ère des Tupolev, un Boeing P-8i Poseidon effectue un passage à basse altitude au-dessus de la base aéronavale INS Rajali en larguant des leurres en mars 2017. © Angad Singh
Un Boeing P-8i Poseidon passe devant des Tu-142 retirés du service. © Angad Singh
Avec aucun avion perdu depuis sa mise en service au sein de la marine indienne, et avec un impressionnant bilan de plus de 30 000 heures de vol sans aucun accident, la cérémonie de retrait des Tu-142 a été une vraie célébration. Après les défilés aériens habituels et un salut au canon à eau pour le dernier Tupolev en service, l’escadron 312 est devenu un escadron de patrouille maritime entièrement composé de biréacteurs Boeing Poseidon.
Le Tu-142 de série IN317 est accueilli par pas moins de quatre camions de pompiers après son dernier vol. © Angad Singh
Les Il-38 de l'escadron 315 ont pu respirer un peu plus longtemps, d'autant plus que le P-8i était beaucoup plus performant que le Tu-142 et pouvait donc assumer davantage de tâches que son prédécesseur. Néanmoins, maintenir en vie la flotte d’Il-38, ces vétérans de l'ère soviétique, était un véritable défi car il nécessitait des réparations et des vérifications de plus en plus complexes pour fonctionner en toute sécurité. Finalement, le temps est devenu le facteur décisif, et même si les P-8i de l'escadron 316 "Condors" n'avaient pas encore été livrés, la marine indienne a décidé de commencer à retirer les Il-38 au fur et à mesure qu'ils terminaient leurs heures de vol.
L'appareil de série IN305, le premier appareil modernisé en 2003, a été le premier à être retiré en décembre 2018. Il a été suivi par l'IN303, qui a été retiré en octobre 2020. L'IN301, le plus ancien Il-38 avec plus de 44 ans de service sous les couleurs de la marine indienne, a été retiré en janvier 2022, laissant l'unité avec seulement deux avions - les cellules les plus jeunes - sur les registres en octobre 2023. C'est à ce moment-là que l'auteur a visité l'escadron 315 sur la base aéronavale Hansa, comme il l'avait fait avec l'escadron 312 à Rajali en 2017.
L'appareil de série IN301, le plus ancien Il-38 de la marine indienne, se pose un beau jour d’octobre 2023 sur la base d’Hansa après une longue sortie de jour au-dessus de la mer d'Arabie. © Angad Singh
"Une bougie brûle plus intensément avant d'être éteinte", a déclaré le capitaine de frégate Mrinmoy Ghosh, le dernier commandant sur Il-36 de l'escadron 315. Il a expliqué que les "Stallions" et leurs avions étaient à leur apogée au cours des années qui ont précédé la fin de l'utilisation de l'Il-38. Visiter un escadron quelques semaines avant le retrait progressif de ses appareils et sa mise en sommeil peut être une affaire triste, mais le petit groupe d'officiers et de marins laissés à la veille de la cérémonie de retrait était bien trop fier et heureux de leur travail pour se laisser abattre par l'échéance qui se profilait à l'horizon. Alors même qu'il se préparait au "début de la fin", l'escadron a reçu et exécuté des tâches opérationnelles pour la marine. Il a effectué une patrouille réelle une semaine seulement avant la mise à la retraite de l'IN306, le 21 octobre dernier.
Un des derniers Il-38 de la marine indienne en service décolle en laissant derrière lui la trace caractéristique des échappements de ses quatre turbopropulseurs Ivchenko. © Angad Singh
Les histoires ne manquent pas : la maîtrise d'un avion difficile procure une satisfaction qui transparaît dans les conversations à la cafétéria de la base. Le capitaine de frégate Vivek Kumar, officier supérieur des opérations aéronavales de l'escadron, adore l'Il-38. "Chaque avion a sa propre personnalité ; il faut apprendre à connaître ses particularités jusqu'à ce qu'il devienne comme un vieil ami". Cette amitié s'est révélée payante de temps à autre.
Le capitaine de frégate Kumar se souvient notamment de l'un de ses moments les plus satisfaisants. Lors d'une mission de suivi d'une flottille, le radar de recherche est tombé en panne. Au lieu d'annuler la mission, l'équipage s'est adapté à la volée, a mis le radar météorologique en service et, malgré la dégradation des performances, a pu maintenir le suivi de la flottille jusqu'à la fin de la sortie. "On ne peut faire cela que si l'on comprend vraiment tout, jusqu'au câblage", nous a-t-il déclaré.
Le poste de pilotage de l'Il-38 est typiquement russe : une véritable exposition de systèmes analogiques et aucun écran. © Angad Singh
Les pilotes racontent des histoires similaires - le Capitaine de frégate Chandrakant Fulshe, pilote principal de l'escadron nous a ainsi déclaré qu'il " se réjouit de pouvoir dompter un avion comme celui-ci. L'environnement multi-équipage ne ressemble à aucun autre avion de la marine, je ne contrôle même pas les gaz, c'est le mécanicien navigant qui le fait. Chaque action doit être réfléchie, plusieurs fois à l'avance, et il y a une communication constante avec l'équipage par intercom. C'est vraiment l'avion de l'homme qui pense avant d’agir".
Le commandant a ses propres histoires à raconter. En tant que chef d'une escadrille de patrouille, il est le plus fier lorsque l'unité accomplit des missions difficiles. Il n'a pas voulu donner de détails sur les missions de l'unité, mais il a déclaré que la chasse aux sous-marins lui procurait la plus grande satisfaction. "Pour moi, c'est comme trouver une aiguille dans une botte de foin. Les équipages et cet avion sont vraiment bons dans ce domaine de la lutte anti-sous-marine. Chaque fois que vous découvrez une piste, l'atmosphère à bord devient vraiment électrique," dit-il en souriant.
Mais pour le commandeur Ghosh et le reste de l'escadron, le véritable point culminant pour le moral s'est produit en janvier de cette année, lorsque l'Il-38 a participé à l'énorme défilé aérien du Jour de la République au-dessus de New Delhi, pour la première et dernière fois dans l'histoire de ce type d'appareil. Le capitaine Fulshe, qui pilotait l'IN306 ce jour-là , se souvient : "C'était la première fois que nous volions en formation avec l'armée de l'air indienne. Notre Il-38 était flanqué d'une paire d'An-32 de l'armée de l'air. C’était la première fois que nous opérions depuis l’aéroport de Jaisalmer, la grande base de l’armée de l’air indienne dans l’ouest du pays au Rajhastan, la première fois que nous avions autant d'avions dans un espace aérien aussi encombré... une expérience sans pareille".
Un Il-38SD de la marine indienne flanqué de deux An-32 de l'armée de l'air indienne lors de la répétition générale de la parade du Jour de la République, le 23 janvier 2023, à New Delhi. © Sanchit Khanna, Hindustan Times
Le capitaine de frégate Ghosh est d'accord. "Rien ne peut égaler le survol de Kartavya Path, l'avenue principale de la capitale nationale", nous a-t-il déclaré avec insistance.
La cérémonie de mise à la retraite de l'Il-38, le 31 octobre dernier, a rassemblé des centaines d'officiers, de marins et de vétérans de l'histoire mouvementée de l'escadron pour célébrer les liens qui les unissent. L'amiral R. Hari Kumar, chef d'état-major de la marine, a présidé la cérémonie. Bien qu'il ne soit pas aviateur lui-même, il a commandé plusieurs navires, dont le porte-avions INS Viraat. Il s'est souvenu avec émotion que "la flotte était toujours heureuse lorsque nous avions un de nos Il-38 au-dessus d'elle", expliquant que les "Stallions" amélioraient considérablement la connaissance de la situation opérationnelle des navires de la marine indienne.
La cérémonie a donné lieu à un hommage aérien à l'Il-38 de la part des autres aéronefs de la base aéronavale INS Hansa. D'abord un Dornier 228 de l'escadron 310 "Cobras" a survolé l’assistance, suivi d'un MiG-29K de l'escadron de chasse 303 des "Black Panthers", puis d'un P-8i Poseidon de l'escadron 316 "Condors". Enfin, émergeant d'un soleil littéralement couchant sur l'horizon ouest, l'Iliouchine Il-38SD IN307 a effectué un passage incroyablement bas au-dessus de la piste, laissant derrière lui les épaisses volutes des traînées de fumée caractéristiques de ses turbopropulseurs dans l'air humide.
Un MiG-29K des "Black Panthers" fait une démonstration lors de la cérémonie de mise à la retraite de l'Il-38. © Angad Singh
Le passage incroyablement bas de l’Il-38 INS307 lors de la cérémonie de retrait des Il-38 en octobre dernier. © Angad Singh
Un Il-38SD effectue un passage à basse altitude lors de démonstrations de puissance aérienne pendant la visite du Premier ministre Narendra Modi sur le porte-avions INS Vikramaditya, en juin 2014. © Marine indienne
L'appareil de série IN307 a ensuite effectué le dernier atterrissage d'un Il-38 en service en Inde, en se posant sur la piste 08 avant de s'arrêter et de se diriger vers sa position de parking sous une salve de canon à eau. L’amiral et les officiers supérieurs ont ensuite salué l'équipage lorsqu'il sortait du ventre de l'appareil, le félicitant pour le départ en fanfare qu'il a donné à un appareil qui a accumulé plus de 52 000 heures de vol opérationnel en 46 ans.
Le capitaine de frégate Ghosh a exprimé toute l'émotion de la soirée : "Chaque avion qui a honoré notre escadron avait une âme. Aujourd'hui, alors que les hélices du 307 s'arrêtent définitivement... les âmes des sept autres Il-38 reste attaché à l’escadron 'Stallion'. Il est de notre devoir de préserver cette âme pour toujours. Alors que nous avions des familles à retrouver après les sorties, l'avion n'avait que nous. Il nous attendait chaque jour avec impatience, désireux de jouer avec nous au-dessus des océans, accomplissant des missions qui semblaient souvent impossibles. Et avec un engagement inébranlable, il nous a toujours ramenés sains et saufs à la maison".
L'ancien et le nouveau, ensembles sur la rampe de la base aéronavale INS Hansa. © Angad Singh
La marine indienne continue d'utiliser d'autres types d'appareils de conception soviétiques. Les hélicoptères Kamov Ka-28 ASW sont entrés en service en 1986 aux côtés des destroyers de la classe Rajput et sont actuellement en cours de modernisation modernisés avec la suite de lutte anti sousmarine israélien Skimmer. En 2003, l’Inde a acquis des hélicoptères de détection précoce aéroportés Kamov Ka-31, pour ses frégates de la classe Talwar. Et bien sûr, le point culminant de l'aviation navale, sont ses chasseurs embarqués, des MiG-29K/KUB russes, qui ont été introduits en 2009. Ils devraient être complétés dans un avenir proche par 26 Rafale Marine de Dassault et, à long terme, devraient être remplacés par un chasseur embarqué de conception et de fabrication indienne actuellement en cours de développement sous le nom de Twin-Engine Deck-Based Fighter (TEDBF).
FIN
ouaf ouaf ! bon toutou !!
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Hello,
Merci pour cet article bien qu'il soit impossible de voir les images chez moi !
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