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L’Archéologie Aéronautique?
Qu’est-ce donc ? Comme en archéologie, on fouille ... dans les vieux numéros des revues spécialisées d'il y a 100 ans (et plus), pour dénicher des choses intéressantes à raconter. Espérons-le !
Bonjour cher(e)s ami(e)s,
Voici une nouvelle histoire étonnante concernant la très fameuse Bataille d’Angleterre. Je l’ai tirée d’un long article bien documenté et bien illustré paru dans le magazine Flying & Popular Aviation, le fameux mensuel américains spécialisé dans l’aéronautique. L’un des intérêts de cet article, paru en décembre 1940 et probablement rédigé en novembre 1940, est que les USA sont alors une nation neutre. Ils ont accès à des renseignements venant des deux belligérants. Vous pourrez d’ailleurs lire avec un intérêt historique un peu amusé comment les Américains corrigeaient les chiffres des pertes fournis par la RAF et par la Luftwaffe pour avoir, d’après eux, une bonne évaluation des pertes réelles.
L’auteur, Leonard Engel, était alors un journaliste renommé, ce qui donne du poids à l’article.
Nous sommes en novembre-décembre 1940, la Bataille d’Angleterre, devenue depuis août la bataille de Londres, n’est pas terminée. On le sent dans la lecture de l’article d’ailleurs. Elle prendra fin officiellement en mai 1941. On sent néanmoins à cette lecture que le plus dur est passé et que les Allemands, les Nazis comme il est ici écrit, ont perdu leur pari et, donc, cette bataille.
Pour rappel, la Bataille d’Angleterre a duré du 10 juillet 1940 à la mi-mai 1941. Elle est généralement divisée en deux phases : la Bataille d’Angleterre proprement dite du 10 juillet 1940 au 22 août 1940, puis la Bataille de Londres du 23 août jusqu’à la mi-mai 1941 avec de plus en plus de bombardements massifs de nuit. C’est une victoire britannique. Les Anglais y perdent 1 744 avions et 1 542 pilotes, mais près de 35 000 civils sont tués ou blessés. Les Allemands y perdent 1 977 avions et 3 510 pilotes et membres d’équipages dont 925 faits prisonniers.
Le passage de cet article qui traite du bimoteur de chasse Me-110 ne correspond pas à la réalité telle qu’on la connait aujourd’hui (voir la note dans le texte). L’auteur américain a dû être mené en bateau par la propagande allemande alors très active aux États-Unis.
Je vous ai donc traduit cet article. Les illustrations proviennent, pour la plupart, de l’article. J’espère que cet article vous intéressera autant qu’il m’a intéressé. Bonne lecture ! Philippe
Couverture du numéro de décembre 1940 de Popular Aviation
La RAF peut-elle être anéantie ? Le siège aérien de Londres
Can the RAF be smashed ? The Aerial Siege of London
Flying & Popular Aviation DĂ©cembre 1940
Par Leonard Engel
En-tête de l’article. Traduction du texte en sous-titre : Pour la première fois dans l'histoire du monde, une nation s’efforce de mettre un empire à genoux en n’utilisant que des avions. Mais la Royal Air Force semble avoir presque sauvé l'Angleterre. Traduction de la légende de la photographie : De nombreux bombardiers nazis, comme les Dornier en haut de cette page, ont connu le sort de cet envahisseur abattu à Londres.
Traduction de l’article original
Ce texte est l'histoire du premier siège aérien de l'histoire, la Bataille de Londres. Une partie a déjà été racontée, l'autre pas encore. Il y a des censeurs partout et beaucoup de ceux qui veulent la raconter ne peuvent voir cette guerre aérienne comme un tout à cause des bombes qu’ils reçoivent.
Les raids à grande échelle sur l'Angleterre ont commencé le 8 août dernier. La ville de Londres proprement dite a été bombardée massivement pour la première fois dans la nuit du 22 au 23 août dernier. Ce n'est cependant que le 8 septembre que ces bombardements nocturnes furieux, qui ni plus ni moins constituent le siège de la plus grande ville du monde, sont devenus réguliers. Au moment où ces lignes sont écrites, le siège est toujours en cours et se poursuivra probablement tout au long de l'hiver.
Il n'est jamais facile de mesurer le but exact d'une manœuvre nazie, y compris l'attaque aérienne sur l'Angleterre, car le haut commandement allemand a montré qu'il pouvait changer de tactique plus facilement et plus fréquemment que tout autre groupe de chefs militaires. Hitler et ses lieutenants ne s'engagent jamais à l'avance (je parle des actions d'Hitler, pas de ses paroles) dans une campagne particulière de manière si approfondie qu'ils ne pourraient plus changer pour tout autre chose si le premier objectif s'avérait impossible.
La mission de bombardement de la Luftwaffe sur l'Angleterre a été claire dès le début : mettre hors d'état de nuire la Royal Air Force, prendre le contrôle de l'air et détruire la navigation, les docks, les bases navales, les moyens de communication et les industries britanniques. Mais les Allemands n'avaient probablement même pas décidé encore de ce qui allait suivre, à savoir quand et comment la Luftwaffe accomplirait ses premières missions. La suite de cette bataille aurait pu être une tentative de victoire par la seule puissance aérienne, ou par une invasion, ou par un blocus aérien, ou toute combinaison des trois. Les Nazis se préparaient à chacune de ces éventualités et ils s’assirent tranquillement pour attendre que les circonstances, quelles qu’elles soient, leur permettent de faire un choix.
Au risque de me tromper, il semblerait bien toutefois que la RAF est encore très loin d'être mise hors-jeu et que tous ces plans Nazis ont été abandonnés. Autrement dit, le blocus et le bombardement des villes britanniques vont se poursuivre certes, mais les Nazis ne pourront plus compter uniquement sur cela pour gagner la guerre.
Figure 1.Traduction des légendes. À gauche : Une "écriture dans le ciel", les traînées de condensation des avions britanniques et Nazis se combattant à de hautes altitudes. A droite : Ces pilotes britanniques insouciants d'un escadron de Hurricane ont été photographiés alors qu'ils se reposaient entre deux patrouilles. Certains d'entre eux participaient au combat montré à gauche.
Le contrôle de l’espace aérien ennemi est une condition préalable nécessaire si l'on veut pouvoir compter principalement sur l'une de ces trois tactiques. Prenons l'invasion, par exemple. Les avions sont le seul moyen de faire taire les batteries côtières qui, autrement, prélèveraient un tribut prohibitif sur les envahisseurs au moment où ils tentent de prendre pied sur la plage. Mais les emplacements des canons sont de petites cibles. Ils sont difficiles à atteindre, et encore plus si un chasseur ennemi est derrière vous. Les bombardements précis ne peuvent être réalisés avec un succès certain que si l’espace aérien ennemi n'a pas d'abord été débarrassé de l'aviation de chasse ennemie.
Alors qu’aujourd’hui leurs espoirs d'invasion se sont apparemment envolés, les Nazis semblent avoir encore une fois changé de stratégie. Le bombardement de Londres en septembre et octobre derniers semble avoir été conçu pour tenir la RAF occupée en Angleterre et empêcher l'envoi de renforts aériens à Suez, où l'Italie prépare une grande offensive visant à casser les reins de l'Empire britannique en Egypte. La RAF possède moins de 500 avions de guerre au Proche-Orient et est largement dépassée en nombre même par la relativement petite force aérienne italienne, dont l'effectif actuel en première ligne est d'environ 3000 avions. Les Nazis espèrent que la destruction systématique de biens et de vies humaines en Angleterre, associée à une défaite majeure ailleurs (au Proche-Orient par exemple), obligera tôt ou tard les Britanniques à faire la paix.
Les raids peuvent être divisés en trois périodes. Pendant la première, du 11 au 17 août, après le début d'une intense activité de bombardement le 8 août et un relâchement de deux jours, la Luftwaffe a envoyé de jour des formations massives de chasseurs et de bombardiers à travers la Manche et la mer du Nord. Suivirent quatre jours d'activité relativement faible, suivis d'une seconde période d'activité en constante augmentation. Au cours de cette seconde période, la Luftwaffe a envoyé ses avions en petites formations ou même individuellement, de jour comme de nuit, en mettant de plus en plus l'accent sur l'activité nocturne. La troisième période date du 8 septembre, et c’est le début du siège de Londres.
Les Nazis n'ont jamais perdu de vue leurs objectifs d'anéantir la RAF. Pour ce faire, ils devaient surtout, espérait-ils, épuiser les pilotes britanniques simplement en les maintenant continuellement en l'air. Malgré l'attention accrue portée à l'infériorité numérique de la RAF en matière d'avions, le véritable problème des britanniques tout au long des trois derniers mois n'a pas été une pénurie de machines, mais d'hommes.
La Luftwaffe disposait, au début de cette guerre aérienne totale, d'environ 15 000 à 17 000 avions de combat (chasseurs, bombardiers et avions de reconnaissance) ; les Britanniques, de 6 000 à 7 000. La part des avions allemands utilisables à tout moment est cependant considérablement réduite par le fait que les avions de la Luftwaffe sont hors service et en révision environ 60 % du temps. Le chiffre correspondant pour les Britanniques n'est que de 25 %. Ainsi, les Nazis ne peuvent pas mettre plus de 6 000 avions par jour en vol sur une période prolongée. Les Britanniques, s'ils avaient des pilotes, pourraient garder 4 000 des leurs dans le ciel.
"S'ils avaient des pilotes", et c’est bien là le hic pour les Anglais. La dernière guerre a montré que des pilotes ne pouvaient supporter sur une longue durée que deux missions par semaine au maximum. Ce qui signifie que chaque avion devrait avoir au moins trois pilotes. C’est cette marge que les Britanniques n'ont toujours pas. En conséquence, les hommes de la RAF ont effectué en moyenne plus d'une demi-douzaine de combats par semaine chacun ; certains ont effectué jusqu'à une douzaine de combats par jour ! Les Nazis espéraient que les pilotes de la RAF craqueraient à cause de la tension et de la fatigue. Aussi incroyable que cela paraisse, ils n’ont pas craqué.
Le nombre de pilotes de la RAF n'est pas connu exactement, c'est un secret militaire pour l'instant, mais il ne dépasse pas 8 000, les pilotes de chasse représentant la moitié. La Luftwaffe, quant à elle, compte environ 25 000 pilotes.
Il y a une raison impérieuse pour laquelle les Nazis ont dû recourir à des tactiques nouvelles pour tenter de paralyser la RAF. Il s'agit tout simplement du fait que la RAF a été (et est) capable d'obtenir la supériorité aérienne sur une zone limitée d’une bataille rangée, une zone trop petite pour que les Nazis puissent faire valoir leur supériorité numérique. Or une invasion correspond à un théâtre aérien de petite taille.
Les Britanniques peuvent remercier leur insistance à doter de l'armement le plus lourd possible leurs chasseurs Spitfire et Hurricane. C’est ce qui leur donne cette capacité à remporter la supériorité aérienne locale. La plupart des Spitfire et des Hurricane sont armés de huit mitrailleuses Vickers de 7,7 mm de calibre et du coup ils peuvent vraiment se frotter au Messerschmitt Me-109, le chasseur monoplace standard de la Luftwaffe.
Certains Spitfires ont été équipés de deux canons de 20 mm et de deux mitrailleuses de calibre 7,7 mm. Ces Spitfires modifiés sont conçus pour contrer le seul avion nazi qui est certainement meilleur que tout ce que possède la RAF, à savoir le Messerschmitt Me-110. Le bimoteur Me-110, avec ses deux canons et ses six mitrailleuses, est cependant trop rapide et trop lourdement armé pour les monoplaces britannique. Ce "cuirassé de poche des airs" comme l'appellent les Nazis, est certainement l’avion de combat le plus dangereux en vol aujourd'hui (NdT – Cette affirmation est totalement erronée. En fait le Me-110 comme chasseur lourd de jour était très inférieur au Spitfire. Sur les 237 Me-110 dont disposait la Luftwaffe au début de la Bataille d’Angleterre, 223 avaient été abattus en combat aérien fin août 1940 !).
Figure 2. Le chasseur biplace bimoteur lourd de la Luftwaffe. Le Messerschmitt Me-110.
Les Britanniques ont développé assez récemment, tardivement ?, leur propre bimoteur pour rivaliser avec le Me-110. Il s'agit du Westland Whirlwind qui pourrait bien être le mystérieux « oiseau nocturne » que la RAF a envoyé en action au début du mois d'octobre. Mais la RAF a relativement peu de Whirlwind et la Luftwaffe dispose de près de 2 500 Me-110. Le Me-110 est en production depuis le début de l'année 1939. Et pourtant, il n'a pas permis de gagner la guerre.
Figure 3. Le nouveau chasseur monoplace bimoteur de la RAF : le Whirlwind et sa verrière innovante.
Au début, les bombardiers nazis arrivaient en escadrons massés avec une escorte d'un seul chasseur pour chaque bombardier, principalement des Me-109 et des Me-110. La protection offerte par un si petit nombre de chasseurs s'est cependant révélée terriblement insuffisante et, arrivant en plein jour, les formations ont été facilement dispersées. Les pertes élevées qui en résultèrent (de 10 à 15 % des avions allemands engagés) entraînèrent un changement de tactique. La proportion des escortes de chasseurs passa à cinq chasseurs pour un bombardier escorté. Depuis cette première semaine d’attaque à tout-va, la Luftwaffe a gardé cette proportion de deux chasseurs pour un bombardier. Les Nazis ont constaté qu'il en fallait au moins autant pour protéger le bombardier suffisamment longtemps pour lui donner une chance raisonnable de faire son travail en Angleterre et de retourner à sa base.
Les autres changements tactiques opérés par la Luftwaffe ont été, bien sûr, le passage à moins de bombardiers par mission à la fois et à plus de missions nocturnes. Le travail de nuit n'est devenu une réalité que lorsqu'un grand nombre de pilotes nazis se sont suffisamment familiarisés de jour avec le paysage britannique. Ces changements ont tous entraîné une forte baisse du ratio des pertes allemandes par rapport aux pertes britanniques, qui sont à peu près égales depuis la dernière semaine d'août, bien que les chiffres publiés par Londres et Berlin ne montrent rien de tel. Soit dit en passant, les experts militaires américains ont dû établir une formule empirique pour estimer les pertes réelles en avions sur la base des rapports des hauts commandements des belligérants. Cette formule est assez compliquée. Prenez une grande respiration et lisez ce qui suit.
Voilà la règle utilisée actuellement. Pour déterminer le nombre d'avions britanniques abattus, prenez le nombre que les Britanniques admettent avoir perdu et ajoutez 50 %. Ensuite, prenez le nombre d'avions britanniques que les Nazis prétendent avoir abattus et soustrayez 40 %. Additionnez ces deux chiffres et divisez-les par deux. Par exemple, si les Britanniques admettent avoir perdu 200 avions sur une période donnée, disons deux semaines. Ajoutez 50 %, soit 300. Pendant cette même période, les Nazis disent avoir abattu 600 avions britanniques. Soustrayez 40 %, soit 360. Ajoutez 300 et 360, soit 660. Divisez par deux : 330 avions britanniques ont vraiment été abattus. Une formule similaire est utilisée pour les pertes nazies, bien sûr. Gardez à l'esprit qu'il s'agit d'une méthode d'estimation empirique et que, comme toute méthode empirique, elle ne s'applique pas aux combats d'un seul jour, mais seulement aux totaux accumulés sur une période de deux semaines ou plus. Et cette méthode n'est de toute façon qu'approximative. Mais c'est la meilleure méthode de calcul, à part aller soi-même sur place compter les avions abattus, bien sûr.
Les deux camps ont naturellement tendance à exagérer les pertes de l'autre et à minimiser les leurs, les nazis étant peut-être un peu plus exagérateurs. Les communiqués de Berlin ont proposé un certain nombre de belles histoires. Un avion, par exemple, aurait abattu 19 avions de la RAF en un seul vol. Il s'agit là d'un mensonge plus que délibéré de la part des autorités respectives. Il arrive souvent qu'un jeune pilote croie honnêtement avoir abattu l'autre, alors que ce dernier ne faisait que jouer aux opossums pour s'échapper et qu'il a plongé dans un piqué qui semblait destiné à se terminer par un crash. Aucun des deux camps n'a plus besoin de témoins pour corroborer un combat victorieux. La parole du pilote est désormais considérée comme suffisante, et, la plupart du temps, il s’accorde à lui-même le fameux bénéfice du doute.
Les informations fiables sur les cibles que les bombardiers d’Herman Goering ont touchées sont évidemment rares, car les Britanniques n'admettent généralement que les pertes de biens et de vies humaines et seulement chez les civils. Voici cependant une liste partielle des cibles frappées par les bombes nazies jusqu'à l'époque où cet article a été rédigé. Il provient de sources confidentielles.
À Londres, les 30 kilomètres de long des quais de la Tamise, qui commencent à un bout de la ville et s'étendent en aval, ont été frappés à plusieurs reprises. Ils sont extrêmement importants car la moitié des importations britanniques passent par le port de Londres et la Grande-Bretagne importe normalement les trois quarts de sa nourriture. Les quais des Indes orientales et occidentales sont particulièrement endommagés. La zone terrestre située entre les bras du fer à cheval contient des entrepôts et des installations de stockage de nourriture, dont la plupart ont été nivelées. Les docks de Liverpool, Newcastle, Bristol, Glasgow et Southampton ont tous été gravement endommagés. Bien que les bombardiers nazis n'aient pas été aussi précis sur l’Angleterre qu’ils l’avaient été en France du fait de la grande opposition de la RAF, il faut relativement peu de précision pour attaquer les docks. Ce sont d'immenses cibles.
Figure 4. Les quais de la Tamise Ă Londres (en septembre 1940).
Parmi les usines d'aviation touchées dont nous avons eu communication, on trouve l'usine Vickers de Southampton, où sont fabriqués les Spitfire ; Vickers à Weybridge, où sont construits les bombardiers Wellington ; l'usine Hawker à Kingston-on-Thames (Hurricanes), juste à la sortie de Londres ; "l'usine fantôme" de Roctes où sont fabriqués les Blenheim, près de Liverpool ; l’usine de fabrication des avions et des moteurs Bristol, juste à la sortie de Bristol ; l'usine Armstrong-Whitworth à Coventry (bombardiers Whitley) ; l'usine de moteurs Rolls Royce à Derby ; l'usine Short Borthers à Rochester, également près de Londres (les fameux hydravions quadrimoteurs et le nouveau bombardier quadri moteur, le Stirling) ; et l'usine Handley-Page, juste à la sortie de la capitale. Cependant, pour autant que l'on puisse en juger, la production ne s’est arrêtée dans aucune de ces usines.
L'arsenal de Woolwich, la plus grande usine de munitions de Grande-Bretagne, située sur la Tamise en aval de Londres, a cependant été gravement endommagée. Il en va de même pour plusieurs gazomètres et centrales électriques dans la plus grande ville du monde. À tout cela s'ajoute la destruction de nombreux égouts, conduites électriques, conduites d'eau, etc.
Mais rien de tout cela n'a pour le moment réellement paralysé le pays, ce dont l'Angleterre doit remercier la RAF. L'effort de guerre britannique est relativement intact. De fait, un essaim d'ouvriers, de policiers et de soldats spécialisés dans les raids aériens effectuaient les réparations d'urgence sur les services essentiels de Londres plus rapidement que les Allemands ne les détruisaient. Les attaques nazies successives ont conduit à transférer de nombreuses personnes, des fournitures et de l'énergie sur une échelle gigantesque pour construire des abris et reconstruire les infrastructures détruites. C'est un facteur d'une grande importance néanmoins, car tous ces gens et ces fonds ainsi mobilisés étaient perdus pour l'effort de guerre direct.
Pendant les deux premières semaines de guerre aérienne intensive, les attaques allemandes ont été principalement dirigées contre des villes et des objectifs militaires, y compris des aéroports, dans le sud-est de l'Angleterre. Les attaques sur Londres n'ont commencé que lorsque la plupart des installations de la RAF dans la région ont été rendues inopérantes. Jusqu’à la fin de septembre dernier, les installations de réparation, les pistes et les hangars de pas moins de 29 bases aériennes de la RAF, principalement dans le sud-est de l'Angleterre et autour de Londres, avaient été mis hors service ou fortement endommagés.
Vous pouvez observer cette évolution en lisant attentivement les dépêches des journaux britanniques. Au début de la Bataille d'Angleterre, on y lisait que les avions britanniques entraient en contact avec l'ennemi au-dessus de la Manche. Puis, pendant un certain temps, le contact a été établi au-dessus de la côte sud et de l'estuaire de la Tamise. Maintenant, il se fait plus souvent près de la périphérie voire même au-dessus de Londres, beaucoup d'avions abattus tombent d’ailleurs dans les rues de la capitale elle-même. À l'heure actuelle, les escadrons de la RAF appelés à défendre Londres doivent opérer principalement à partir d’aérodromes éloignés situés au nord et à l'ouest de Londres. Par conséquent, à leur arrivée sur les lieux du combat, les chasseurs anglais n'ont plus beaucoup de carburant. Les chasseurs monoplaces nazis doivent aussi, bien sûr, parcourir une longue distance, mais ils ont trouvé une solution. Ils opèrent par relais d’escadrilles de chasse de protection qui s’échelonnent sur le parcours des bombardiers. Les Allemands ont suffisamment d'avions en réserve pour jouer la partie ainsi; les Britanniques non !
Dans le cadre de l'effort allemand visant à épuiser la RAF, l'un de leurs principaux objectifs a été de tenter d’épuiser les réserves anglaises, notamment de pilotes. Conscients de leur besoin de pilotes reposés pour contre-attaquer au plus vite en cas d’invasion, les Britanniques avaient décidés de mettre de côté quelque 2 000 pilotes, qui étaient soit maintenus au sol sans avion ou bien stationnés près de villes qui n'étaient pas sujettes à des attaques fréquentes. L'une des raisons du déplacement de l'effort de guerre allemand vers Londres était la conviction allemande que cela obligerait le commandement de la RAF à jeter toutes ses réserves dans la mêlée.
Les Britanniques ont résisté le plus longtemps possible à la tentation de prélever sur leurs pilotes de réserve, mais ils ont été finalement contraints d'en envoyer certains à la bataille de Londres. Vous souvenez-vous de ces quelques jours, entre le 10 et le 14 septembre, où Londres ne semblait plus défendue que par un barrage anti-aérien incroyablement lourd (la DCA tiraient alors plus d’un demi-million d'obus chaque nuit) ? C'est à cette époque que les Britanniques ont commencé à faire venir des hommes des zones périphériques pour que les pilotes fatigués puissent prendre un peu de repos.
En résumé, il faut bien reconnaître que les Allemands ont fait d'énormes dégâts en Angleterre. Pourtant, en un seul jour, pas plus de 1 000 avions de la Luftwaffe étaient envoyés de l'autre côté de la Manche et de la mer du Nord, soit moins d'un cinquième des effectifs de l'armée de l'air nazie. Il est difficile d'imaginer l'horreur qui s'ensuivrait si tous les avions allemands étaient lancés simultanément sur l’Angleterre. La raison précise pour laquelle seulement 1 000 des 5 000 appareils de la Luftwaffe étaient envoyé chaque jour reste un mystère. L'une des explications est que les Allemands pensaient que ce millier par jour suffirait à désarmer suffisamment la RAF en vue d'une invasion ou de toute autre chose que Berlin aurait en tête. Le reste des avions était gardé en réserve pour le coup final. Lorsqu'il est apparu que ce millier d’avions quotidiens était trop peu, le commandement allemand a peut-être pensé que le risque d'engager le reste de la Luftwaffe était trop grand, qu'il valait mieux poursuivre le siège de Londres à l'échelle actuelle et porter le coup principal ailleurs et plus tard.
Bien qu'il y ait eu des moments où la Royal Air Force a fortement plié devant les assauts répétés de la Luftwaffe et où les habitants de Londres semblaient fortement ébranlés, jusqu'à présent aucun des deux n'a été brisé. La résistance obstinée de l'armée de l'air anglaise a peut-être été due à une erreur que les Allemands ont commise, comme on commence à le savoir. Ils ont grossièrement sous-estimé la production aéronautique maximale que les Britannique pourraient atteindre. Mais ils n'ont pas été les seuls surpris (nous aussi avons été surpris) lorsque les chiffres pour juillet et août ont finalement été divulgués, le mois dernier. En effet, les constructeurs britanniques, sous l'impulsion du cabinet de Winston Churchill, ont réussi à produire pas moins de 2 500 avions nouveaux au cours de chacun de ces mois, dont 40 % de chasseurs. C'est à peu près le double du taux de production maximal que les Allemands (et d’autres) pensaient que la Grande-Bretagne pourrait atteindre. Cet exploit industriel a été d'une grande aide.
FIN
ouaf ouaf ! bon toutou !!
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Bonjour
Article très intéressant que cette analyse presque "à chaud". Merci
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