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Une histoire vécue : le sens de l’orientation chez les jeunes pilotes de chasse en 1944...
Par A. Thibaudet
Texte Publié dans le N° 608 du 20 octobre 1947 de la revue mensuelle L’AIR – L’organe de la Ligue Nationale Populaire de l’Aviation
Novembre 1944. Depuis quelques jours déjà , le groupe de chasse 1/4-Navarre occupe le terrain d’Ambérieu. C’est de là que décollent les P-47 Thunderbolt français qui commencent à pénétrer loin à l’intérieur de l’Allemagne. Le moral est excellent, l’ennemi recule partout. L’activité aérienne est intense, les sorties succèdent aux sorties. La cadence est telle que la minutie de la préparation des missions n’est plus toujours aussi poussée qu’elle avait été jusqu’alors. Il arrive aussi que les jeunes pilotes derniers arrivés au groupe n’écoutent pas toujours les recommandations des anciens.
Un P-47 Thunderbolt de la toute nouvelle Armée de l'Air française fin 1944.
Que ce soit pour une raison ou pour une autre, c’est au fait de ne pas avoir emporté de cartes que le jeune sergent L., tout récemment arrivé au groupe, dut ce jour-là faire une mission d’attaque supplémentaire au-dessus de la plaine d’Alsace et, le même jour, faire un voyage d’agrément et de tourisme avec son P-47 au-dessus de la Suisse.
Le tout jeune pilote L. est affecté depuis quelques jours seulement au groupe 1/4. Une sérieuse instruction lui a été donnée dans les écoles militaires américaines, et qui se donnera la peine de consulter son dossier ne trouvera rien qui laisserait supposer qu’il serait un navigateur exceptionnel ni rien qu’il ne sache jamais retrouver sa position. Il a déjà effectué deux missions au-dessus de l’Allemagne et, aujourd’hui, il va décoller pour sa troisième mission. Cette sortie aurait également été sans histoire si, au retour, après la courte traversée d’un petit nuage peu épais il n’avait perdu de vue son chef de patrouille.
Jusque-là , rien d’extraordinaire. Mais, ayant peut-être l’âme versatile, alors qu’il scrutait l’horizon en tous sens, il aperçoit quelques points noirs. Ce sont des P-47 oui, mais des américains auxquels il se joint et qu’il suit jusqu’à leur terrain à Dôle. Là , il se pose comme un ancien, parfaitement à la suite des autres.
Voulant prouver sa bonne volonté, il fait part aux Américains de son désir de regagner sa base d’Ambérieu. Ceux-ci très compréhensifs, font aussitôt le plein de son P-47, réservoirs supplémentaires y compris. Une précaution qui n’aura pas été inutile comme la suite de ce récit le montrera.
Ne possédant aucune carte, le sergent L. fait appel aux connaissances de navigation très pointues de nos alliés. Les Américains de Dôle tracent, calculent et traduisent pour finalement indiquer le cap, la distance et le temps nécessaires pour regagner Ambérieu.
Voici L. de nouveau en l’air, de nouveau ... seul ! Y-a-t-il eu confusion dans son esprit, trou dans sa mémoire, ou tout simplement une mauvaise lecture de ses cadrans ? Toujours est-il qu’au bout d’un temps qui dépassait largement le temps indiqué par les Américains, le bon sens du sergent L. lui souffle à l’oreille : « Tu es complétement perdu ! ». Et c’était bien vrai, il n’en est du reste pas plus surpris que ça.
Acceptant la triste évidence, il décide prudemment de faire demi-tour et de retourner à l’aérodrome de Dôle. Dans son esprit, faire demi-tour c’est ajouter 180° au cap suivi. Mais, là encore, il est probable que la réalisation n’a pas suivi la conception ! Car après avoir franchi des montagnes, des vallées et des rivières, il surgit tout à coup au-dessus d’une grande ville avec un immense terrain d’aviation à sa périphérie ... Genève ou Bâle, on ne le saura jamais, mais, ce qui est sûr c’est qu’il survolait alors la Suisse !
« Ça ne doit pas être ça » se dit-il et, tout à coup, il opte, sans rien calculer, pour un autre cap au petit bonheur la chance ! La chance va lui sourire car, des points noirs volant en formation sont visibles à l’horizon. Forçant sa vitesse, il parvient à les rejoindre. Coup de chance, ce ne sont pas des allemands mais une escadrille de P-47 du 2/5 Lafayette qui alliât se livrer aux saintes joies du mitraillage au sol dans la plaine d’Alsace. Sans hésiter, le sergent L. s’adjoint à leur formation et prend la place du dernier ailier sans, semble-t-il que le reste de l’escadrille ne le repère d’ailleurs.
Il les accompagne et fait tout ce qu’ils font. Ce sera sa première mission d’attaque au sol, il faut bien commencer. Aussi s’en donne-t-il à cœur joie en compagnie de ses petits camarades du Lafayette.
Le chef de l’escadrille ne s’était pas aperçu que son groupe s’était accru d’une unité. Il était plus habitué à ce que ce soit en sens inverse hélas. Aussi lorsqu’à la fin de la mission, il regroupe ses équipiers et se rend alors comte de la génération spontanée d’un P-47, il est ... quelque peu surpris ! Son étonnement disparut vite quand, voyant le surnuméraire le rejoindre et le pilote faire de grands gestes, il comprit qu’il s’agissait là probablement d’un égaré bientôt à court de carburant.
Bienveillant, ce chef de groupe le conduit aussitôt à la verticale d’un terrain proche et, avec de grands gestes lui aussi, invite le sergent L. à s’y poser puis il rejoint sa formation et retourne à sa base. L. abandonne alors son sauveur, se pose sur le terrain indiqué pour se rendre compte qu’il était revenu à ... Dôle !
On ignore l’accueil des Américains qui le virent revenir après avoir tout fait pour le mettre sur le cap de sa base. Le sergent L. n’en a jamais rien dit ! En tout cas, s’ils n’ont jamais cru vraiment à ce qu’il leur disait, ils ont été suffisamment polis pour ne pas le montrer. Les mauvaises langues disent qu’ils le mirent dans un compartiment fermé à clef d’un train qui le ramenait à Ambérieu.
Dernière modification par philouplaine (27-06-2018 14:05:04)
ouaf ouaf ! bon toutou !!
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Marrant cet historique, un plaisir Ă lire ..
Patou
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Disons que les américains n'étaient peut-être pas meilleurs car cette histoire m'en rappelle une autre.
Le samedi 26 août 1944 à l'aube, plusieurs P51 D du 55 Fighter Group du 338 Fighter Squadron du 8 Fighter Command décollent de leur base de Wormingford dans l'Essex (Airfield Station 159 pour l'USAAF) pour une mission d'escorte de bombardiers B 24 Liberator de la 8ème Air Force au dessus de Ludwigshaffen, par la suite 7 des appareils d'escorte attaquèrent ( mission de Starfing ) un dépôt de chemin de fer sur Nancy avant de retourner vers leur base en Angleterre parmi eux, 3 pilotes, le 1st lieutnant Samuel E Hansard ( au commande du P 51 D 5 NA matriculé 44-14050 ) le 2nd lieutnant John E Kester et le 1st lieutnant Sam D Gevorkian affrontèrent un orage assez violant, les éclaires frappèrent leurs appareils, déréglant leurs instruments de bord, avant qu'ils ne s'en aperçoivent, ils se retrouvèrent au dessus de Bordeaux ( pensant être en Normandie ) et furent chaleureusement accueillit par la Flak et même touchés ( tout du moins pour l'appareil de Gevorkian ) mais visiblement sans gravité, quelques trous dans la carlingue rien de plus, mais les pilotes pensaient alors être au dessus de la Normandie et non dans le Sud Ouest, leur jauge de fuel descendait rapidement, il devenait donc urgent d'atterrir, Gevorkian ( au commande du P51 D Da Quake immatriculé CL P, n° 44-13954, initialement l'appareil du Major Mc Ginn ) et Kester ( au commande du P51 D immatriculé CL U, n° 44-13663 ) décidèrent de faire un atterrissage forcé sur une plage qu'ils croyaient être la côte normande en réalité ce fut sur la plage de Lège Cap Ferret en début d'après-midi. Croyant que l'océan qui pointait à l'horizon était le Channel, le premier lieutenant Hansard décida malgré le peut de carburant qui lui restait de tenter de rejoindre sa base, ce pilote de 25ans fut porté disparue au combat, son corps fut retrouvé par un navire de la Royal Navy non identifié à ce jour, au large du Golf de Gascogne et il fut inhumé en mer; à cour de carburant le lieutenant à dû se crasher dans l'Atlantique ou amerrir et espérer voir arriver des secours qui n'arrivèrent jamais.
Ses deux amis eurent quant à eux plus de chance et réussirent à se poser au Cap Ferret sans trop de casse et sans être blessés ( les allemands ayant évacués le Cap Ferret 5 jours avant, ils eurent donc la chance de ne pas être fait prisonniers ) ils furent secouru par les habitants de l'Herbe et de Lège, environ une heure après leur atterrissage, plus tard dans la soirée après avoir fini de saboter leurs appareils, ils furent rapatriés sur Arcachon avec l'aide des FFi locaux et le prince Stanislas Poniatowski qui étaient le maire d'Arcachon à l'époque ( ils furent d'ailleurs hébergés chez lui à Arcachon pendant 2 semaines le temps que le réseau d'évasion vers Hendaye s'organise ) maire d'Arcachon à l'époque puis ils resteront 2 jours chez mr Dubreille (membre des FFI de Bordeaux) à Caudéran, par la suite, Xavier Testas organise leur transfert vers Hendaye, ils retrouvèrent d'autres aviateurs alliées ( Anglais et US ) abattus au dessus de la France, il arrivèrent à Gastes, puis de Hendaye, ils prirent un C-47 à destination de l'Angleterre, le 13 septembre 1944 à 8h30, le C47 ce pose enfin sur la base de Wormingford ou les pilotes partirent direction le 63 Brook Street (bureau de l'I.S.9) ou ils furent immédiatement prie en charge par l'officier S-2 pour interrogatoire, après débriefing auprès de l'Intelligence Service chacun retourna dans son unité et repartit au combat.
Blédina: "Essayer c'est grandir"
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Cher bede40,
Merci pour ton histoire ... confondre la Manche avec les plages d'Aquitaine ... une paille !
Impressionnant.
Philippe
ouaf ouaf ! bon toutou !!
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Si on fait l’effort de se mettre à la place d’un seul de ses quatre protagonistes, voilà deux histoires riches d’enseignement, et qui appellent plus à la compassion qu’à la gentille moquerie !
Merci du partage !
Dernière modification par coyotte (24-07-2018 05:45:43)
Heureusement que c'Ă©tait un chihuahua, si c'Ă©tait un chat ce serait un chi'miaoumiaou
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