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L’Archéologie Aéronautique?
Qu’est-ce donc ? Comme en archéologie, on fouille ... dans les vieux numéros des revues spécialisées d'il y a 100 ans (et plus), pour dénicher des choses intéressantes à raconter. Espérons-le !
Chers amis,
Voici un très long texte, que vous pourrez soit lire d’un coup soit picorer selon vos envies et votre passion pour cette époque. Ce texte est la traduction d’un article que j’ai tiré de la documentation américaine de la fin de 1945. Il s’agit du texte complet (chose très rare) d’un document du Service de l’Intelligence de l’USAAF (US Army Air Force, l’ancêtre de l’USAF) publié en juin 1945 (source très rare) dans la revue confidentielle "Impact", revue mensuelle qui était destinée aux officiers de l’USAAF. Ce document confidentiel fut très vite déclassifié et rendu public en décembre 1945 (chose très rare aussi), dans la revue mensuelle spécialisée dans l’aviation Flying. Cet article expose bien la stratégie que l’USAAF s’est fixée sur le théâtre d’opérations européen ainsi que son évolution au cours de la guerre. Ce texte étant vraiment très long, j’ai dû le découper en plusieurs parties pour pouvoir le poster en entier sur ce forum.
Je vous ai donc traduit ce texte en français, pensant que certain(e)s d’entre vous seraient intéressé(e)s tant par sa valeur historique que par les informations, toutes plus intéressantes les unes que les autres, dont il fourmille. Rien que pour ça il mérite qu’on le lise in extenso. Un exemple de détail ? On y apprend que le coût pour l’Armée américaine de livrer un bombardier B-24 Liberator neuf de son usine de production aux Etats-Unis à Aberdeen, la base générale de l’USAAF au Royaume-Uni, était de 1 100 dollar par avion (1 100 dollars de 1944 représentent 15 800 dollars de 2019)... qu’un bombardier B-24 coûtait 115 300 dollars nu et 213 700 dollars totalement équipé et livré à Aberdeen ... que lors d’une mission de bombardement en août 1943 sur 376 B-17 engagés, 205 (!!!) furent perdus dont 60 abattus au-dessus de l’Allemagne ... qu’en 1943, les pertes de la 8ème Air Force furent telles à un moment qu’aucune mission de bombardement n’eut lieu pendant quatre mois de suite après (une information qui montre que les renseignements fournis dans l’article sont plutôt sans langue de bois) ... etc. etc.
J’ai placé les illustrations comme elles l’étaient dans l’article de Flying, pas toujours au mieux d’après moi... mais j’ai respecté l’article original (pour une fois : Traduttore, non traditore !).
Bonne lecture !
Philippe
COMMENT NOS FORCES AÉRIENNES STRATÉGIQUES ONT REMPORTÉ LA GUERRE EN EUROPE
Dans cet article, un document historique, notre revue Flying vous apporte le compte-rendu officiel de la théorie, des méthodes et des résultats obtenus par la RAF et l’AAF (Note : AAF = Army Air Force, le nom de l’USAF en 1945. L'USAAF deviendra USAF en 1947). Cet article est la reproduction in extenso d’un numéro spécial de la revue Impact, la publication confidentielle des Services du Renseignement de l’AAF à destination des officiers. Ce document analyse et présente notamment les efforts de la coordination des commandements de la 8ème Air Force et de la 15ème Air Force avec le RAF Bomber Command.
Article paru dans le numéro décembre 1945 du mensuel américain Flying & Popular Aviation.
En-tête de l’article. Traduction de la légende : La victoire aérienne en Europe. Comment nos forces aériennes stratégiques ont gagné la guerre aérienne en Europe ? Dans ce document historique, FLYING vous apporte un compte-rendu officiel sur la théorie, les méthodes et les résultats de la RAF et l’AAF dans cette guerre.
NOS BOMBARDEMENTS STRATÉGIQUES ONT BRISÉ L’ALLEMAGNE
Dans les guerres du passé, il fallait toujours rencontrer l’armée ennemie face à face et la vaincre avant de ne pouvoir occuper son territoire ou bien lui dicter les termes de la paix. La récente guerre en Europe a été différente, en ce sens que la nation ennemie a été détruite en grande partie avant même que nos troupes n’attaquent son territoire et sans que l’armée ennemie ne puisse y faire grand-chose. Cette analyse a pour but de montrer comment une telle nouveauté stratégique, un tel paradoxe a pu être réalisé.
Pour la seconde fois en une génération, l’Allemagne vient d’être vaincue par une coalition de puissances alliées. Pour la seconde fois en une génération, son Armée a lutté contre des adversaires sur deux fronts dans une suite impressionnante de grandes batailles sanglantes, y a gagné des victoires retentissantes mais a fini par être totalement vaincue. Sous ces aspects, les deux guerres sont semblables. Mais dans la réalité, ces deux guerres mondiales sont totalement différentes. Dans la première, il n’y eut aucun combat sur le sol allemand et aucune ville allemande ne connut de destructions notables. Les civils allemands, à l’arrière des fronts, ne connurent aucun des aspects de destruction liés à toute guerre. Ils ne connurent de la guerre que les privations et la faim. Leurs cités et leurs usines émergèrent totalement indemnes de la guerre, ce qui ne fut pas le cas de la Belgique et du nord de la France par exemple. Après la défaite, leurs armées retournèrent au pays musique en tête et drapeaux déployés. Et, ainsi, elles présentaient l’illusion qu’elles n’avaient pas vraiment été vaincues. Une terrible illusion qui allait s’ancrer dans la nation allemande et la préparer à l’aventure suivante.
Mais lors de cette seconde confrontation, la nation allemande n’eut pas la même chance qu’à la première. L’Allemagne dut faire face à une nouvelle arme, qui passait au-dessus des lignes de front et allait frapper directement le seul véritable ennemi, le travailleur allemand qui fabriquait et entretenait le matériel de guerre du soldat allemand. Le travailleur allemand subit le choc des premiers bombardements directs peu de temps après que la Grande-Bretagne soit entrée en guerre. Ces chocs se succédèrent à une cadence de plus en plus élevée, avec des bombardements de masse quasiment quotidiens, pendant cinq ans. A la capitulation, l’Allemagne avait cessé d’exister en tant que communauté industrielle organisée. L’Allemagne était totalement détruite, habitations et usines !
Figure 1. Traduction de la Légende : Numériquement, les pertes en avion des Allemands ont dépassé de loin celles du Corps Aérien Américain (US Army Air Force). La majorité des avions allemands perdus étaient des chasseurs, alors que la majorité des nôtres était des bombardiers. Couleurs de l’histogramme : Rectangles Noirs, pertes américaines dans des combats avion contre avion ; Rectangles Blancs, pertes américaines par la flak ; Rectangles Gris, pertes de la Luftwaffe dans des combats avion contre avion.
Le concept de ces bombardements de masse, qu’on appelle bombardements stratégiques, était né bien avant la guerre. En fait, il existait déjà , sous une forme larvée, lors de la guerre précédente. Tellement larvé, que l’idée même de porter directement par les airs la destruction dans le territoire ennemi et que ce soit une priorité militaire, était largement repoussée dans les milieux décideurs des années 1920. Cela ne veut pas dire néanmoins que les nations n’étaient pas intéressées par la force aérienne. Loin de là . Les puissances principales : Le Royaume-Uni, la Russie, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Japon et les États-Unis avaient chacune sa propre force aérienne. Avec les progrès techniques de l’aéronautique, ces forces aériennes devinrent plus grandes et plus versatiles. Mais, dans les faits, elles restaient des adjointes des forces navales et terrestres. De plus, les commandes de nouveaux avions ne répondaient qu’à des critères d’appui des forces navales et terrestres. En d’autres termes, cette aviation militaire était une arme tactique, pas stratégique.
Figue 2. Traduction de la légende : Des cônes de fuselage de Messerschmitt Me-110 pointent leur nez vers le ciel dans ce hall d’une usine de Furth dont le toit a disparu. Les bombardiers lourds de la 8ème Air Force ont bombardé cette usine la première fois le 25 février 1944. Quelques mois plus tard, l’usine avait été péniblement reconstruite et commençait tout juste à reprendre son activité d’assemblage des Me-110 quand elle fur à nouveau bombardée avec comme résultat ce qui est visible sur cette photographie.
Il existait pourtant deux exceptions notables. Les Anglais, comprenant mieux que quiconque le potentiel décisif de l’aviation, avait créé une armée de l’air indépendante: la Royal Air Force. Mais les orientations décidés par les autorités politiques de l’entre-deux guerre, vivement combattues déjà par Winston Churchill, avait abouti à ce que la RAF soit une arme principalement défensive et pas offensive. C’est aux États-Unis que se théorisa et se développa le concept du bombardement stratégique. Il est assez difficile aujourd’hui de se rendre compte combien cependant ce concept était une faible flamme, bien vacillante car constamment attaquée. L’Armée Américaine était alors bien petite, considérant la taille de son pays, et donc de peu d’influence dans les milieux décideurs de Washington. Et c’est au sein de cette petite Armée qu’existait un plus petit ensemble encore : le Corps Aérien, auquel personne ou presque ne prêtait vraiment attention. Et au bout de cette chaîne, il y avait un tout petit groupe de pilotes qui réfléchissait à la conception de « cargos » aériens capables de délivrer une grande quantité de bombes à une longue distance tout en échappant aux chasseurs ennemis. Et les décideurs de Washington s’intéressaient encore moins à eux !
Mais, eux, ils se consacraient à leur marotte avec patience et constance. Ils développèrent, aidés par un industriel visionnaire, un viseur qui satisfaisait leurs très dures conditions pour la précision du bombardement. Ils tombèrent tous d’accord pour que le bombardier soit un avion quadrimoteur, tout métallique, et puissamment équipé de mitrailleuses, une vraie Forteresse. C’est ainsi qu’ils nommèrent leur projet : la Forteresse Volante. Quand, finalement, un prototype fut construit, ils passèrent tout leur temps à le faire voler et à le tester pour routes sortes de conditions. Et c’est ainsi que, année après année, ils développèrent leurs compétences pour ce genre d’avion afin d’en faire, finalement, une arme offensive d’un tout nouveau genre comme le monde n’en avait encore jamais connu. Une arme qui, s’ils avaient raison et si elle était validée par l’expérience, révolutionnerait la conduite de la guerre. Cette arme répondait à une théorie nouvelle. Cette théorie, assez abrupte, proposait tout simplement de construire une grande flotte de bombardiers quadrimoteurs à long rayon d’action capable de porter chacun une grosse quantité de bombes pour détruire prioritairement les ressources industrielles de l’ennemi directement sur son territoire. Cette théorie prévoyait que toutes les ressources industrielles de l’ennemi seraient réduites en cendres, provoquant immanquablement la fin du conflit.
Et c’est bien ce qui se passa ! Ces flottes de bombardiers furent lancées sur l’Allemagne depuis l’Angleterre au nord et l’Italie au sud. L’Allemagne, aujourd’hui, présente un spectacle de désolation qui défie toute description. Tous ses ponts sont détruits, tous ses canaux sont détruits, tous ses ports sont détruits et encombrés d’épaves, toutes ses gares et son système ferroviaire sont rasés et inutilisables pour des mois voire des années, beaucoup de ses usines ne sont que ruine et totalement à l’arrêt pour longtemps, et dans chacune de ses cités ce ne sont que maisons éventrées et rues bouchées par les ruines. Partout où des allemands s’étaient réunis pour construire des usines, ou pour vivre ensemble en grand nombre, partout ce n’est qu’un triste spectacle de désolation totale. Ce qui était l’une des nations les plus puissantes de la terre évoque maintenant la surface désolée de la lune. Il n’est pas faux de dire que jamais, depuis les temps effroyables des razzias des Huns, les biens et les propriétés d’une nation n’avaient été réduits si totalement en cendres et gravas. Et c’est notre aviation stratégique qui a réalisé cet exploit militaire.
L’Allemagne nous déclara la guerre le 11 décembre 1941. A cette époque, toute l’Europe continentale était soit annexée, soit totalement dépendante économiquement de l’Allemagne. Un programme efficace et sans pitié avait été institué qui exploitait les ressources industrielles et la main d’œuvre du continent entier pour augmenter, jour après jour, la puissance militaire de l’Allemagne dans des proportions encore jamais vues. Il ne fallait pas être un grand devin pour s’apercevoir que, dans ces conditions, toute attaque conventionnelle à l’ouest serait vouée à l’échec, tant la puissance de l’armée allemande, soutenue par l’industrie de tout un continent, était grande. Et ce, aussi longtemps que cette puissance serait soutenue par l’industrie du continent européen. Et c’est dans cette atmosphère bien lourde et peu engageante que les leaders américains et britanniques se rencontrèrent avec leurs cabinets de guerre pour concevoir et mettre au point le programme qui devait aboutir à la défaite de l’Allemagne.
Figure 3. Titre de la figure : Statistiques des bombardements. Panneau du haut : Nombre total de missions de bombardements stratégiques des Commandements américain (courbe noire) et anglais (courbe rouge) pour chaque mois. Panneau du bas : Tonnage total de bombes larguées par les bombardiers américains (courbe noire) et anglais (courbe rouge) pour chaque mois. Les panneaux commencent en janvier 1942, date du début de la Seconde Guerre Mondiale pour les États-Unis. Traduction de la légende : Ces graphiques montrent les nombres des missions aériennes et le tonnage des bombes larguées, mois par mois, en comparant les forces aériennes stratégiques américaine et anglaise. Les données numériques du tonnage fournies par l’USSTAF (United States Strategic Air Forces in Europe) comprennent aussi les missions au-dessus des théâtres d’opération du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, alors que les données de la RAF ne concernent que les missions partant de l’Angleterre. Ces graphiques montrent bien la montée en puissance rapide des opérations américaines qui a rattrapé très vite la puissance anglaise, dès décembre 1943.
Figure 4. Les deux avions de la victoire pour nos Forces Aériennes Stratégiques en Europe, le Boeing B-17 Forteresse Volante à gauche, et le Consolidated B-24 Liberator à droite.
La localisation géographique de l’Angleterre a été la clef. En effet, les îles britanniques sont à distance de vol du pays ennemi, ce qu’elle avait appris à leurs dépens. L’Angleterre avait tenu bon aux assauts aériens de l’ennemi durant la Bataille d’Angleterre. Et elle tiendrait bien encore si c’était nécessaire. Il fut donc décidé de transformer l’île en une gigantesque base aérienne. C’est de là que partiraient des flottes de bombardiers lourds contre les centres industriels allemands. Une fois ces centres affaiblis au point où ils ne pourraient plus subvenir convenablement aux besoins de l’Armée allemande, on pourrait alors lancer un assaut terrestre à l’ouest et y ouvrir un second front.
Aujourd’hui, la victoire acquise, cela semble évident. Mais, cette stratégie a été décidée à une époque où l’échec éclatant des bombardements allemands durant la Bataille d’Angleterre était encore dans tous les esprits. Pour beaucoup d’officiers supérieurs, cet échec de la Luftwaffe signifiait que toute tentative similaire lancée par nous contre eux serait tout autant vouée à l’échec. Les bombardements, ça ne marchait pas ! Voilà l’idée fréquemment rencontrée à l’époque dans les Hauts-Commandements alliés. Les Britanniques eux-mêmes ne croyaient pas aux bombardements de jours, à cause des pertes élevées qu’ils envisageaient pour ce genre d’opération. En conséquence, tous les bombardiers lourds de la RAF étaient équipés pour des bombardements de nuit. Du fait qu’il est très difficile de repérer et viser correctement un objectif précis de nuit avec un viseur qui n’est conçu que pour des bombardements de jour, les premiers bombardements de la RAF furent peu efficaces, voire pas efficace du tout. Ensuite, les Britanniques développèrent la doctrine de l’attaque de saturation contre des villes, plus faciles à repérer de nuit.
En bombardant massivement les villes, ils espéraient ainsi toucher, par chance, des centres industriels importants car on les trouve souvent dans ou près des centres urbains. De plus, cette méthode du bombardement de saturation devait interférer avec la vie quotidienne des travailleurs allemands au point où leur puissance de travail dégringolerait brutalement. On espérait ainsi atteindre non seulement les outils de production mais aussi les ouvriers producteurs. Le but recherché était de rendre la vie impossible aux travailleurs allemands en détruisant leurs habitations, leurs systèmes de transport, en les empêchant de se ravitailler en nourriture, en arrêtant la distribution de l’électricité, de l’eau et en détruisant les égouts. L’un des buts recherchés était aussi bien évidemment d’éliminer définitivement la puissance de travail des travailleurs allemands en les tuant.
Cette doctrine n’était pas la manière la plus économique d’utiliser des bombes, mais c’était la seule (NdT- Souligné dans le texte) que les Anglais pouvaient utiliser pour affecter fortement leur ennemi. Il ne fallut pas longtemps avant que les bombardiers de la RAF ne soient merveilleusement efficaces à "effacer" leurs cibles (NdT - blotting out their targets). Quelques mois après son entrée en guerre, les bombardiers américains arrivés en Angleterre se chargèrent des bombardements de jour, ceux de la RAF se cantonnant à la nuit. Cette disposition permit de lancer deux salves d’attaque par jour contre le territoire allemand. Attaquant de jour, il fallait que ces bombardiers soient lourdement armés pour se défendre contre les attaques attendues des avions de la Luftwaffe. Le rayon d’action de nos bombardiers devait être important, ils devaient donc emporter plus de carburant. En conséquence, nos bombardiers ne pouvaient emporter une charge de bombe aussi grande que celle des bombardiers anglais. La stratégie américaine de bombardement était aussi différente de celle des Anglais. Puisque le tonnage de bombes embarqué serait plus petit, il fallait que chacune des bombes emportées touche vraiment sa cible industrielle. La doctrine poursuivie était que si l’on bombardait en masse des cibles industrielles bien choisies, car essentielles à l’effort de guerre allemand, alors, en quelques assauts de ce genre, l’économie militaire globale de l’ennemi serait fortement mise à mal et son Armée perdrait de sa puissance offensive. Dans de nombreux milieux militaires, tant américain qu’anglais, on en doutait très fortement à l’époque.
Malgré ces oppositions, l’offensive combinée de bombardement fut lancée. Dans son concept, c’était un peu plus évolué qu’un simple roulement entre assauts de jour et assauts de nuit. Chaque force aérienne se chargeait de missions que l’autre force ne pouvait ou ne savait pas effectuer ; il devait y avoir une complémentarité d’action. Les bombardiers américains devaient détruire en priorité les centres industriels situés près des grandes villes le jour. Et les bombardiers anglais venaient attaquer ces mêmes villes et leurs banlieues la nuit. Au fur et à mesure que ces deux forces aériennes prirent de l’importance, c’est exactement ce qui se passa. Jour après jour, les centres industriels de l’Allemagne furent soit fortement endommagés, soit détruits totalement les uns après les autres. Par exemple, à Magdebourg le 9 février dernier, les bombardiers de la 8ème Air Force endommagèrent l’usine d’essence synthétique de Rothansee, puis les usines Junkers. À Buchau, ils détruisirent les usines d’armement Krupp. Puis, la mission suivante fut de détruire les dépôts militaires de Friedrichstadt où les armements produits à Buchau par Krupp étaient entreposés avant leur distribution à la 6ème Panzer Armee. La nuit qui suivit chacune de ces missions, les bombardiers de la RAF vinrent causer de forts dégâts aux villes attenant chacune de ces cibles. Ces bombardements n’avaient pas que pour seul but de détruire les habitations et les moyens de transport des travailleurs allemands de ces usines et entrepôts, mais aussi d’ajouter encore plus de destruction aux centres industriels qui venaient, quelques heures plus tôt, d’être bombardés par les américain. Cette stratégie fut payante.
Ces deux grandes forces aériennes alliées, qui avaient au départ des conceptions stratégiques si opposées, devinrent un outil mortel car chacune reconnut ses propres faiblesses et les forces de l’autre. Par exemple, l’introduction par la RAF des fusées éclairantes larguées d’un bombardier de tête et l’utilisation d’un viseur d’un type nouveau adapté aux bombardements de nuit, modifièrent graduellement la technique du bombardement de nuit qui devint de plus en plus ciblé et de moins en moins celle d’un tapis de bombes largué au petit bonheur. Beaucoup de gares allemandes, de canaux, et les ruines de nombreux centre-ville en témoignent visiblement aujourd’hui. Dans les faits, après que la menace de la Luftwaffe ait été réduite à néant, les anglais purent aussi envoyer des missions de jour avec des bombardiers du type Lancaster ou Halifax qui étaient notoirement moins armés que les B-17. La multiplication de ces missions de jours, où les anglais attaquaient en de nombreux endroits simultanément avec des petites formations, eut comme effet immédiat d’épuiser la dangereuse Flak allemande.
La conséquence en fut que les pertes causées par la Flak devinrent très faibles, surtout considérant la défense anti-aérienne très robuste que les allemands avaient établie autour de leur usine d’essence synthétique, vitales pour eux. Par exemple, la formation américaine qui vint bombarder l’usine de production d’essence de Magdebourg ne perdit que trois appareils du fait de la Flak. En revanche, du temps de la pleine puissance de la Luftwaffe, les pertes en bombardiers de la RAF étaient supérieures à celles de l’ennemi, et cela bien que les missions fussent uniquement nocturnes. Ce fait démontre bien la vérité du proverbe militaire qui veut que pour chaque arme un antidote existe, en l’occurrence c’était le chasseur de nuit. L’efficacité de la chasse de nuit allemande fut telle à un moment que le Bombing Command de la RAF envisagea sérieusement de mettre un terme définitif aux missions nocturnes, ce que l’on sait peu. A cette époque, les missions nocturnes étaient devenues tellement dangereuses que la RAF envisageait d’opérer des missions diurnes, chose qu’elle trouvait suicidaire au début du conflit.
Fin de la Partie I ... À suivre
ouaf ouaf ! bon toutou !!
Hors ligne
La suite de ce long document de 1945 ... Partie II
NOS BOMBARDEMENTS STRATÉGIQUES ONT BRISÉ L’ALLEMAGNE (Suite)
Pour en revenir au sujet de cette étude, les bases aériennes localisées sur les îles Britanniques avaient à la fois leurs intérêts et leurs inconvénients. Etudions-les. Tout, absolument tout ce dont nous avions besoin, les hommes, l’essence, les pièces de rechange, tout devait venir des Etats-Unis par bateaux à travers 5 000 km d’océan dans lequel les dangereux U-boat patrouillaient. En conséquence, la première tâche tactique de la 8ème Air Force fut de détruire les bases des U-boat sur la côte atlantique française. Au début de notre intervention en Europe, la menace des U-boat était telle que si nous n’avions rien fait pour la limiter, nous n’aurions jamais pu bâtir une force aérienne suffisante en Angleterre. Et donc, les tout premiers engagements des bombardiers américains furent au-dessus de Lorient, St Nazaire et Brest. Le 6 mars 1943, 71 bombardiers B-17 attaquèrent de jour les abris des U-boat à Lorient. Trois B-17 furent abattus et 7 chasseurs ennemis furent abattus par les mitrailleuses des Forteresses Volantes. Les abris des U-boat à Kiel, Wilhelmshaven et Brême furent attaqués simultanément par les bombardiers de la RAF. Toutes ces attaques furent un échec, il faut bien le dire.
Les abris, formidablement construits, ne furent que endommagés à la marge. Ces abris en béton armé étaient tellement colossaux que les bombes les plus puissantes que nous utilisions à l’époque ne faisaient que les effleurer sans aucun résultat tangible. L’un dans l’autre, cette campagne de bombardements n’affecta la puissance sous-marine allemande que d’environ 10%, tout au plus, diminuant d’autant le nombre de sous-marins opérationnels en Atlantique Nord et en augmentant sensiblement la durée de maintenance de chaque sous-marin entre deux missions. C’était peu, mais c’était toujours ça de moins sur nos routes maritimes. A la même époque, le Coastal Command de la RAF avait modernisé sa flotte et offrait une protection des convois sur la moitié orientale du voyage vers l’Europe. Ces deux actions combinées firent que notre force aérienne en Angleterre put petit à petit croître suffisamment, moins vite que nous l’aurions voulu il est vrai. Ce ne fut donc qu’à la fin de l’été 1943 que la 8ème Air Force fut en mesure de lancer des missions massives au-dessus de l’Allemagne. Et à la fin de novembre de la même année, la 15ème Air Force fut installée et opérationnelle sur des bases au sud de l’Italie.
La première cible donnée aux 8ème et 15ème Air Forces fut l’industrie aéronautique allemande. Notre adversaire, comprenant un peu tardivement ce qu’il lui en couterait si nos bombardiers arrivaient à leur fin, fit un effort désespéré et gigantesque pour accroître sa production mensuelle de chasseurs. Le but était d’arriver, par leur nombre, à ce que les chasseurs de la Luftwaffe balayent nos bombardiers du ciel. Pour nous, il était évident que si nous voulions détruire systématiquement toute l’industrie allemande, il nous fallait commencer par celle qui maintenait leur aviation militaire à son plus haut niveau. Tel fut le but de ces missions, le jour nous bombardions leurs usines d’armement aéronautique, pratiquement toutes localisées dans des banlieues de grandes villes, la nuit la RAF détruisait ces mêmes villes et diminuait ainsi le potentiel économique des travailleurs de ces mêmes usines, ou du moins de ce qu’il en restait. La lutte pour la maîtrise du ciel qui en résulta dura à peu près toute une année (automne 1943 – automne 1944). Veuillez vous reporter aux documents donnés en annexe pour les détails.
Au début, ce fut effrayant. Nos pertes en bombardiers étaient telles que nous consommions tous les avions de la 8ème Air Force en seulement quatre mois. Un équipage de B-17 avait à peu près trois mois de vie seulement. Un rythme vraiment effrayant. Mais au printemps 1944, les choses commencèrent à vraiment changer. Les pertes diminuaient nettement. Et au moment du débarquement en Normandie, en juin 1944, la Luftwaffe n’existait plus. Nous l’avions emporté. La Luftwaffe ne devait plus du tout être un obstacle pour nos opération armées futures et nos pertes en bombardiers dues à l’action de la chasse allemande devinrent d’un coup totalement insignifiantes. Ainsi les bombardiers lancés au-dessus de Magdebourg en janvier 1945 ne rencontrèrent aucun chasseur allemand.
Dès le mois de mars 1944, les usines aéronautiques allemandes étant quasiment toutes détruites, elles cessèrent d’être notre cible prioritaire. La cible prioritaire devint les moyens de transport. Notre aviation tactique avait pour mission de paralyser les mouvements des forces ennemies afin de diminuer le potentiel militaire du front en Normandie. Nos bombardiers lourds furent dirigés contre les gares de l’Allemagne et des territoires occupés. L’idée était que la paralysie des transports ferroviaires paralyserait la distribution efficace vers les armées ennemies des stocks produits par les usines d’armement encore debout. En effet, dans toute nation industrialisée comme l’Allemagne, la fabrication de biens finis par l’industrie demande le transport préalable, principalement ferroviaire et par péniche sur les canaux, du charbon, de l’acier, et, entre autres, des produits chimiques. Si cela cesse, toute l’industrie afférente est mise à l’arrêt aussi efficacement que par un bombardement.
Au début, nos attaques sur le système ferroviaire n’eurent que peu d’impact notamment parce que le réseau ferré de l’Europe de l’Ouest était le plus développé au monde. Une ligne était-elle mise à l’arrêt, qu’il en existait plein d’autres qui la contournaient. Il fallut plusieurs mois de bombardements massifs quasiment quotidiens pour que le réseau ferré allemand soit suffisamment mis à mal pour que les Allemands commencent à avoir de gros problèmes pour transporter leurs biens militaires d’un endroit à l’autre. En Angleterre et aux États-Unis, cette campagne de bombardement des installations du réseau ferré allemand paraissait à presque tous comme une perte de temps et de moyens, cependant, les procès-verbaux d’interrogatoire de prisonniers hauts-gradés et d’industriels allemands montrent tous que l’effet atteint au bout de quelques mois fut très incapacitant pour l’industrie et l’armée allemandes. L’Allemagne ne réussit à maintenir un réseau ferré un peu utilisable qu’au prix d’un effort surhumain. Et la main d’œuvre et les moyens nécessaires pour ce résultat furent tous pris sur les besoins de l’armée allemande, diminuant du même coup sa puissance combative. Cet état de fait courut surtout sur les six derniers mois de la guerre.
Dès le mois de mai 1944, l’attaque des centres ferroviaires et des moyens de transport passa au second plan. La priorité des bombardiers américains devint alors les centres industriels de production de carburant synthétique. Mais, du fait de l’augmentation notable de notre flotte de bombardiers à cette époque, ces nouvelles missions ne diminuèrent pas l’effort en direction des centres ferroviaires ennemis. Les deux missions purent être menées de front. Une autre raison fit qu’on continua à attaquer le réseau ferroviaire allemand, les centres ferroviaires sont faciles à atteindre, faciles à bombarder et difficiles à défendre. C’est ainsi que, assez souvent, une mission de bombardement d’un centre de production d’essence synthétique qui n’avait pas pu atteindre son objectif était réassignée en plein vol vers un centre ferroviaire. Et chaque nuit suivante, la RAF ajoutait sa part aux destructions du réseau ferré allemand.
La campagne de bombardement des centres de production d’essence synthétique s’avéra être la menace la plus mortelle pour l’effort de guerre allemand, loin devant les autres. La situation qui en résulta fut rapidement catastrophique pour le commandement allemand. C’est ceci qui causa l’immobilisation quasiment totale de la Luftwaffe, c’est aussi cela qui mis à l’arrêt les divisions blindées ennemies. C’est ce qui força les unités du front à revenir aux engins à charbon et aux unités hippomobiles. Des camions et des tanks par milliers furent rendus inutilisables. Cependant, du fait de leur rôle essentiel, les centres de production d’essence synthétique étaient les industries les plus fortement protégées de toute l’Allemagne. La concentration de la flak y était incroyable, et les chasseurs de la moribonde Luftwaffe qui pouvaient encore prendre l’air étaient tous utilisés pour défendre ces centres.
Quand on se rend compte de l’immense succès de cette campagne de bombardement, il est légitime de se demander pourquoi on ne l’a pas débuté plus tôt. La réponse est qu’il nous fallait d’abord mettre totalement KO toute la Luftwaffe, avant d’envisager d’attaquer d’autres cibles particulièrement brûlantes. Si nous ne l’avions pas fait, l’usure de notre flotte due aux pertes face à la chasse allemande aurait été certainement telle que nous aurions dû espacer les missions de bombardement tant que les attaques auraient eu un gain quasiment nul. C’est la seule raison qui nous fit considérer les centres de production d’essence synthétique comme cible prioritaire seulement à partir du début 1944. Mais, à ce moment-là , l’imminence de l’invasion de Normandie nous fit encore différer de deux mois ces missions d’attaque des centres de production d’essence synthétique. De plus, les bénéfices des bombardements des centres ferroviaires étaient immédiats, alors que les bénéfices de la destruction des centres de production de carburant synthétique n’étaient visibles que lorsque les stocks accumulés étaient épuisés.
Comme en second plan, les Alliés continuèrent à cette époque à mener des missions de bombardements contre d’autres cibles industrielles. La Ruhr, et son incroyable concentration de flak, devint connue chez les aviateurs anglais, qui la visitèrent presqu’un millier de fois durant la guerre, comme la « Vallée Heureuse » (The Happy Valley). La mission des bombardiers lourds de la RAF était de détruire systématiquement les unes après les autres, les usines et les villes de la Ruhr. Puis, méthodiquement, ce fut le tour des usines de roulements à bille de Schweinfurt, les productions de camions et de chars d’assaut, les productions de munition, les usines de fabrication de matériel ferroviaire, les entrepôts et, toujours et encore, les dépôts ferroviaires. Mais d’autres types d’usines ne furent que très rarement la cible de nos bombardiers, en accord avec notre doctrine de bombardement stratégique. C’est ainsi que les centres industriels de production d’aluminium, les centrales électriques, les usines chimiques (autres que celle produisant de l’essence synthétique), et les usines produisant des machines-outils furent relativement épargnées. Il n’était pas nécessaire de gaspiller des munitions à les endommager alors que la destruction des autres cibles immobilisait leurs productions presque totalement. Nos 8ème et 15ème Forces Aériennes asséchaient la racine de l’arbre et tout le feuillage tombait.
Au milieu de 1944, pour la première fois, la production industrielle globale allemande connut une très forte baisse qui terrifia les nazis du fait de nos incessants coups de boutoir. A l’automne 1944, la production industrielle allemande était quasiment à l’arrêt. Durant l’hiver 1944-1945, le peu qui restait de production ne permit pas à l’armée allemande, qui avait lancé son dernier coup désespéré dans les Ardennes et y avait échoué, d’offrir une réelle résistance à nos armées. La résistance allemande à partir de ce moment-là ne fut plus qu’une longue suite d’escarmouche désorganisée et sans réel soutien industriel. A l’arrière des lignes, l’Allemagne était devenu un désert industriel, les magnifiques industries qui, naguère encore, se dressaient fièrement n’étaient plus que ruines. L’armée allemande à court de nourriture, de renforts, de munitions, d’essence, et de moyens de transport, ne vécut ensuite qu’une longue suite de retraites, reculant en longues colonnes démoralisées de ville détruite en ville détruite jusqu’à la reddition finale. Un spectacle étonnant pour nos soldats qui le vécurent. Une armée en ruine dans un pays en ruine et, ceci, grâce à nos bombardiers stratégiques principalement.
Toute personne qui n’aura pas vu de ses propres yeux l’étendue de la destruction de l’Allemagne en mai 1945 yeux aura du mal à se le figurer. Les 50 principales villes allemandes étaient toute détruites de 30 à 90 %. Des civils hagards se frayaient un chemin au milieu des amoncellements de ruines qui bloquaient toutes les rues. Aucun transport public, pas d’eau, pas d’électricité, pas de systèmes de distribution de nourriture. Rien ! Après tout, ces gens avaient soutenu le régime allemand vaincu.
Le régime du plus fort régnait en maître dans l’Allemagne nazie et, ce, jusqu’au moment où nos armées vinrent rétablir l’ordre démocratique, distribuer de la nourriture, rétablirent l’eau, l’électricité et déblayer les ruines. Toutes les usines, sans exception, n’étaient que des ruines réparées puis de nouveau détruites. Les gares et les entrepôts ferroviaires, inutilisables, étaient devenus de vastes terrains de jeu pour des gamins insouciants. Les fermiers du coin faisaient paître leur troupeau sur les ruines des terrains d’aviations. Du magnifique et complexe système industriel que des générations d’allemands avaient lentement façonné, il ne restait qu’un squelette branlant. Tout était à reconstruire !
Figure 5. Graphique montrant la répartition des tonnages de bombes larguées en focntion des domaines d’activité des cibles visées en Allemagne. Traduction des étiquettes sur la figure (dans le sens des aiguilles d’une montre) : Cities, villes ; Military and Naval targets, cibles militaires et navales ; Transportation and misc., Transports et divers ; Airfields and A/C factories, terrains d’aviation et usines de construction d’avions ; Specific industries, industries particulières ; Oil, raffineries et usines de carburant synthétique. Traduction de la légende : Et voici les cibles visées. Un examen attentif de ce graphique met en évidence non seulement que l’importance relative des cibles n’était pas le même pour la RAF et pour l’USAAF, mais aussi les approches théoriques fondamentalement différentes entre les deux forces aériennes en matière de bombardement stratégique. L’USAAF a eu tendance à focaliser ses forces sur des cibles industrielles et les transports, alors que la RAF s’est focalisée sur les villes et sur de cibles militaires.
NOS BOMBARDIERS ONT BRISÉ L’INDUSTRIE AÉRONAUTIQUE ALLEMANDE
Le commandement allié combiné (Combined Chiefs of Staff) décida et ordonna au début de 1943 que la cible prioritaire de la campagne de bombardement serait l’industrie aéronautique allemande. À cette époque, la puissance de la Luftwaffe rendait la chasse allemande extrêmement dangereuse pour toutes nos missions. Lors de nos premières missions en 1943, 8 à 10 % de nos bombardiers ne revenaient pas, ayant été abattus par les chasseurs de la Luftwaffe. A ce taux de perte, sachant que nous menions alors environ 10 missions par mois, toute notre force aérienne aurait dû être renouvelée entièrement chaque mois. Un rythme presqu’intenable. La toute-jeune 8ème Air Force se battait donc littéralement pour sa survie. Comme le renouvellement de nos bombardiers n’atteignait pas ce taux, quelque chose devait être fait et rapidement sans quoi la 8th Air Force allait cesser d’exister.
Figure 6. Traduction des légendes. Panneau de gauche : En 1942, les Allemands produisaient tous leurs chasseurs Messerschmitt Me-109 dans trois grosses usines à la suite d’un changement de priorité industrielle passant d’une priorité sur la production de bombardiers à la priorité de la production en masse de chasseurs. Mais cette centralisation de la production est venue trop tard pour les Allemands. Panneau de droite : La dispersion des usines d’assemblage des chasseurs Me-109 fut effective dans le courant de1944, après que les trois principales usines aient été détruites par nos bombardiers. La production de Me-109 a alors atteint le record de 1 400 Me-109 produits en avril 1944, mais à ce moment les Allemands manquaient de carburant et de nouveaux pilotes.
À la même époque, les stratèges américains avaient compris que le succès de toutes campagnes futures au sol en Europe dépendrait de l’élimination de la menace de la Luftwaffe. En 1943, l’industrie aéronautique allemande n’était pas encore enterrée et elle ne dépendait que de quelques gros centres industriels. En endommageant, voire détruisant, ces quelques centres industriels simultanément, on pouvait s’attendre à ce que la puissance combative de la Luftwaffe soit fortement impactée en seulement quelques semaines. Or c’est précisément le temps qui nous manquait.
Au début, l’infériorité numérique de nos bombardiers et l’absence de toute couverture de notre chasse eurent comme conséquence de mettre terriblement à mal la puissance combative de nos bombardiers. L’histoire des Forces Aériennes US gardera toujours dans sa mémoire l’horreur du sanglant été 1943.
À Warnemunde le 29 juillet 1943, par exemple, une formation de 54 Forteresses Volantes attaqua l’usine Focke-Wulf qui y fabriquait des Fw-190. Sur les 27 bâtiments du complexe Focke-Wulf, 18 furent rasés et nous ne perdîmes que quatre appareils sur 54. Mais la veille, une escadrille de 28 Forteresses Volantes B-17 attaquait les usines Focke-Wulf de Oschersleben, qui produisait à l’époque 50 Fw-190 par mois – pas moins de 21% de la production totale mensuelle de Fw-190 – Si nos Forteresses Volantes abattirent ce jour-là pas moins de 48 chasseurs ennemis, ce sont 15 d’entre elles qui furent abattues par les chasseurs de la Luftwaffe. Quinze sur 28 ... plus de la moitié en une seule mission !
Mais tout le sel de ces premières missions de bombardement se trouve le mieux dit dans la conférence faite à l’AAFSAT (NdT : Army Air Forces School of Applied Tactics : Ecole de Tactiques Appliquées des Forces Aériennes de l’Armée) par le lieutenant-colonel Beirne Lay, Jr., un copilote et observateur spécial de l’AAF lors de la mission de bombardement des usines Messerschmitt de Regensburg, le 17 août 1943. Ces usines produisaient alors à cette époque le tiers de la production de tous les chasseurs de la Luftwaffe (Me-109 et Fw-190 compris). Cette double mission est entrée dans l’histoire comme étant la première où la 8ème Air Force engagea la quasi-totalité de ses bombardiers et la première à faire une navette de bombardement. Une mission dite double parce que la flotte des bombardiers partie d’Angleterre se sépara au-dessus du territoire ennemi, la plus grande partie alla bombarder les usines de roulements à bille de Schweinfurt puis elle retourna à sa base en Angleterre. Le restant (une flotte de 147 B-17) alla bombarder les usines Messerschmitt à Regensburg puis de rendit directement de là à des bases en Algérie. Voici quelques citations tirées de la conférence du Lt.-Col. Berine Lay :
"Notre flotte de bombardement était divisée en trois groupes, le premier comptait trois escadrilles, le second et le troisième deux escadrilles chacun. J’étais dans la troisième vague dans un appareil localisé en bas de la formation. On nous avait dit au briefing que nous serions escortés par des P-47 Thunderbolt lors de la traversée de la Ceinture des Chasseurs (NdT : The Fighter Belt). A cette époque, les P-47 n’emportaient que de petits réservoirs supplémentaires largables de 100 gallons seulement. Cela voulait dire que nous n’aurions plus leur assistance quand nous atteindrions l’objectif.
La flotte s’assembla dans les temps après le décollage. Quand nous fûmes à notre altitude de croisière (17 000 pieds pour notre groupe), nous étions déjà repérés par les radars allemands. En conséquence, toute la machine de défense anti-aérienne allemande montait déjà en puissance devant nous, et nous étions à une heure de vol du territoire allemand.
En réponse à nos attaques de diversions, systématiquement montées pour disperser les forces allemandes, l’ennemi avait adopté une défense très fluide mais remarquablement efficace. Au moment même où nous survolions la côte ennemie, les radaristes allemands nous suivaient minute par minute et commençaient à se faire une bonne idée de notre objectif. Ils étaient aidés en cela par le relatif faible rayon d’action de nos bombardiers qui nous obligeait, pour les cibles profondes en territoire ennemi, à prendre une route directe. Les radaristes allemands commencèrent à ameuter les chasseurs du Danemark, de Paris et de Lille sur notre route.
Nous rencontrâmes les premiers chasseurs à la verticale d’Eupen, seulement une cinquantaine de km depuis la côte alors qu’il nous restait plus de 200 km de vol avant d’atteindre Regensburg. C’est là que nous étions supposés retrouver notre couverture aérienne de Thunderbolt. Mais voilà , ils n’étaient pas là . En fait, notre formation gigantesque de plusieurs centaines de bombardiers s’étirait sur une vingtaine de km de long et les P-47 étaient positionnés en avant de la formation. Nous étions à la queue sans protection.
C’est à cet instant que les chasseurs ennemis, des Me-109 et des Fw-190, nous attaquèrent dans des passes remarquablement bien coordonnées venant de toutes les directions afin de perturber nos mitrailleurs. Tout à coup, je me rendis compte que cette attaque de la Luftwaffe dépassait en intensité tout ce que j’avais connu jusque-là . Je comptais ce jour-là plus de 200 passes d’attaques entre Eupen et notre objectif.
Ce jour-là les chasseurs allemands n’utilisèrent que leurs canons de 20 mm avec des munitions perforantes dévastatrices. Ce fut également la première fois qu’ils utilisèrent des fusées air-air. Plus incroyable, des avions allemands nous survolaient de très haut et larguaient sur nous des bombes minutées pour exploser dans les airs au sein de notre formation. Étonnamment, la flak quant à elle était presque totalement muette. Quand nous arrivâmes sur notre objectif, déjà 17 des 147 B-17 de notre flotte avaient été abattus, presque tous à l’arrière dans la troisième vague.
Sur l’objectif la météo était excellente, au moment où nous en approchions, les chasseurs allemands disparurent subitement du ciel. Je n’ai jamais compris pourquoi. Probablement le manque de carburant. Notre bombardement fut excellent, je n’observais qu’une petite dizaine de bombes (sur des milliers larguées) éclater en-dehors de la limite de l’objectif.
Mais ce sont surtout les gars de l’autre flotte, celle destinée à Schweinfurt, qui subirent les plus lourdes pertes ce jour-là . 35 de leurs B-17 furent abattus. Au total notre flotte avait perdu 25 appareils. Ce jour-là , ce sont donc 60 bombardiers B-17 qui furent perdus sur les 376 appareils engagés (un terrible 16 % de pertes)... sans compter ceux qui parvinrent à revenir mais dans un état non réparable (55 B-17) et ceux qui furent fortement endommagés en nécessitèrent d’importantes réparations sur plusieurs semaines (90 B-17 sur 376). Ce fut donc un total de 205 avions mis hors de combat sur 376 en une seule double mission. On sut, pas la suite, que les mitrailleurs de nos Forteresses avaient ce jour-là abattu 27 chasseurs ennemis.
Les points positifs de cette mission furent la navigation, qui fut parfaite en nous amenant directement sur l’objectif, la mission elle-même car nous endommageâmes très gravement les deux centres industriels ce qui compromit le renouvellement des chasseurs de la Luftwaffe, et, enfin, la discipline des équipages sans quoi je ne sais comment nous aurions pu résister autant aux attaques des chasseurs allemands.
La conclusion pratique de cette mission fut que la protection des bombardiers par des escortes de chasseurs était absolument nécessaire tant à l’aller qu’au retour sous peine de pertes excessives. Le fait que, en dépit de l’opposition très puissante que nous avons rencontré ce jour-là , nous ayons réussi nos deux missions prouve rétrospectivement la grande valeur de nos équipages de bombardiers !"
Cette citation montre bien l’esprit combatif de nos équipages en 1943, elles montrent bien aussi la dureté des combats aériens et leurs coûts en homme et en matériel presque prohibitifs. Dans cette double attaque, les allemands avaient perdus mois de 10 pilotes, beaucoup des pilotes abattus par nos B-17 avaient pu sauter, alors que nous avions perdus 600 hommes, tués ou prisonniers.
Figure 7. Traduction de la légende : Mission de la 8ème Air Force du 17 août 1943 sur les centres industriels de Regensburg et de Schweinfurt. Cette mission fut l’une des plus dures de toutes celles effectuées par la 8ème Air Force pendant la guerre. Ce diagramme géographique, qui a été simplifié par rapports aux cartes militaires, montre les routes suivies par nos bombardiers à l’aller et au retour ainsi que les pertes, avion par avion, tout le long d’une seule mission meurtrière. Cette année 1943 fut très critique pour nous, le dénouement de la guerre se joua cette année-là . Les traits noirs fins qui convergent vers les routes suivies par nos bombardiers sont les trajectoires d’interception exactes suivies par les chasseurs ennemis, avec le nom de leur base aérienne d’origine, telles que définies par le Renseignement. On voit que certaines formations ennemies n’établirent jamais le contact avec nos formations de bombardiers, d’autres en revanche réussirent à attaquer les deux formations l’une après l’autre. En tout, les Allemands lancèrent 288 chasseurs à l’attaque ce jour-là . Chaque silhouette d’avion colorée en rouge représente un B-17 abattu, pointant l’endroit exact où l’avion a été atteint. Sur les 376 bombardiers envoyés dans ces deux missions, 315 réussirent à atteindre leur objectif. Soixante B-17 furent perdus en action, ce qui représente 16 % de la force envoyée et 19 % de la force sur objectif. De tels niveaux de pertes montrent bien l’importance stratégique de détruire le potentiel militaire de la Luftwaffe si l’on voulait pouvoir attaquer correctement et fréquemment els centres industriels de l’Allemagne.
Il fallait changer la méthode de notre stratégie, sans changer la stratégie elle-même. Au début de 1944, la scène changea. La 8ème Air Force devenait enfin plus puissante chaque jour, malgré les pertes. La Luftwaffe commençait à devenir nettement moins puissante mais restait toujours aussi combative. Nos missions de bombardement étaient désormais escortées, d’abord par les Thunderbolt, puis par des Lightning puis par les remarquables Mustang. C’est ainsi que le 11 janvier 1944, une flotte de 720 bombardiers B-17 et B-24 accompagnée de leur escorte de chasseurs, put s’engager au-dessus du territoire allemand et aller bombarder Oschersleben. Sur les 720 appareils, 56 furent abattus lors de la mission, principalement par la Luftwaffe.
L’offensive de l’hiver 1943-1944 connut son apogée lors la "Grande Semaine" (The Big Week) qui eut lieu du 19 au 26 février 1944. Voici les données combinées des actions de l’AAF et de la RAF cette semaine-là .
Bombardiers envoyés en mission cette semaine : 8 148
Chasseurs d’escorte engagés : 4 454
Tonnage des bombes larguées : 19 177 tonnes
Perte en bombardiers : 400
Perte en chasseurs : 39
Chasseurs de la Luftwaffe abattus par notre aviation : 642.
Durant cette semaine intensive, une flotte de 300 bombardiers alla attaquer pour la deuxième fois, depuis l’attaque précédente d’août 1943, les usines Messerschmitt de Regensburg. Entre temps, les allemands avaient réparé en partie l’usine détruite qui recommençait à produire des Me-109 mais en plus faible quantité qu’avant. De même, une usine proche de la même ville qui produisait à l’origine des planeurs avait été transformée pour produire des chasseurs Me-109. Cette seconde visite de nos bombardiers rasa totalement les deux usines qui ne devaient plus jamais être remises en état.
À la fin de cette Big Week de février 1944, la production aéronautique allemande fut à l’arrêt total et elle ne devait jamais s’en remettre vraiment. Nous avions réussi. La campagne des bombardements des usines aéronautiques allemandes continua jusqu’en septembre 1944. A partir de cette date, elle alla en s’atténuant sauf pour l’attaque des usines de productions des chasseurs à réaction qui devint, à cette époque, une nouvelle priorité.
Figure 8. Traduction de la légende : Nos bombardements ont contraint les Boches à installer leurs usines aéronautiques sous terre. Au début de 1944, ce programme d’usines souterraines était déjà bien avancé. Nos Forces d’Occupation ont recensé 80 de ces usines souterraines en Allemagne. Sur cette photographie, l’usine de construction du chasseur à réaction Heinkel He-162 dans une mine de sel près d’Egeln.
Fin de la Partie II ... À suivre
ouaf ouaf ! bon toutou !!
Hors ligne
La suite de ce long document de 1945 ... Partie III
NOS BOMBARDEMENTS STRATÉGIQUES ONT BRISÉ L’ALLEMAGNE (Suite)
Nous avons désormais accès aux statistiques allemandes de l’époque et nous pouvons donc mesurer précisément l’effet de nos campagnes de bombardement. Dans la première moitié de 1943, nos bombardiers livraient seulement 400 tonnes de bombes par mois en Allemagne. Mais en 1944, ce tonnage était monté à 6 500 tonnes par mois. En 1943, nos bombardements détruisirent 58 usines de production d’avion, et en 1944 ce furent 146 centres de production d’avion qui furent détruits. On a évalué que nos missions de bombardements de 1944 contre les usines de production d’avion ont privé la Luftwaffe d’environ 10 000 avions, principalement des chasseurs.
Quand en juillet 1943, nous avons commencé à attaquer les usines aéronautiques allemandes, leur production mensuelle étaient de 1 740 avions neufs, dont 910 chasseurs Me-109 et Fw-190. Les plans de l’administration Speer étaient de porter la production à 3 000 avions neufs chaque mois au début de 1944. Mais nos bombardements répétés et intensifs firent tant qu’en mars 1944 la production mensuelle d’avions en Allemagne n’était que de 1 300, plus de la moitié inférieure aux prévisions et inférieure à la production de 1943. Malgré nos efforts, la production d’avions en Allemagne atteignit un maximum en septembre 1944 avec, ce mois-là , 1 950 avions neufs produits dont 1 400 étaient des chasseurs. Cela venait d’une nouvelle méthode de production où les pièces étaient construites dans des dizaines de petites usines, quelque fois de la taille d’un moulin à vent, dispersées dans tout le territoire y compris dans la campagne, loin des villes. Les avions étaient ensuite assemblés dans de vastes usines souterraines ou bien directement dans des hangars sur les terrains d’aviation.
Figure 9. Traduction de la légende : L’une des entrées (et c'est la principale) de l’usine souterraine très élaborée de Kahla près d’Iéna qui fut la première connue pour assembler le chasseur à réaction Messerschmitt Me-262.
Mais cette nouvelle méthode de production vint trop tard pour l’Allemagne. La diminution des remplacements d’avions détruits devint telle que la Luftwaffe n’engagea plus qu’au compte-goutte ses unités dans la défense du Reich. La disparition de la menace de la Luftwaffe du ciel allemand nous permit alors, dès septembre 1944, de mener d’importantes missions de bombardements très destructrices sur d’autres types d’usines. Et c’est alors que l’ensemble de la puissance industrielle de l’Allemagne commença à se désagréger, pan après pan, une catastrophe en entraînant aussitôt une autre.
On sait aujourd’hui qu’aux 10 000 avions dont nos bombardements empêchèrent la production on doit ajouter les plus de 20 000 chasseurs allemands abattus par nos avions et ceux de la RAF entre le 1er août 1943 et le 20 septembre 1944. Durant toute la guerre aérienne (de 1942 à 1945), notre aviation perdit 18 418 appareils contre une perte de 30 152 avions chez l’ennemi (abattus par nos avions sans compter l’action de la RAF). Du 1er aout 1943 au 20 septembre 1944, la plus désastreuse pour nous, nous perdîmes 14 000 avions dont 5 500 à cause de la flak et 8 500 à cause des chasseurs en combat aériens. Durant la même période, la Luftwaffe perdit 23 000 avions. Toutes les pertes de la Luftwaffe ne sont pas uniquement dues aux combats aériens. Nos bombardements des terrains d’aviation ont aussi causé de gros dégâts aux ateliers de réparation et d’entretien, retardant d’autant le retour au combat des appareils endommagés. Il n’était pas rare que dans chaque terrain capturé on trouve des tas d’avions endommagés amoncelés sur le côté. Enfin, l’avancée de nos troupes au sol a permis la capture de très nombreux avions allemands immobilisés suite aux bombardements tactiques des aérodromes, rendant inutilisables le pistes d’envol.
En dépit de ces pertes et de nos bombardements, du fait d’un nombre croissant d’usines enterrées, la Luftwaffe parvint néanmoins à maintenir un assez grand nombre d’avions en état de combat. Mais elle ne pouvait plus les mettre en l’air pour repousser nos attaques constantes avec des flottes de plus en plus nombreuses en bombardiers. Le carburant et les pilotes commençaient à manquer aussi. En fait, la Luftwaffe a été la première victime de l’effondrement de l’appareil industriel allemand. Elle a été aussi victime de la supériorité en nombre et en technicité de nos avions et de la meilleure formation de nos pilotes. Les 8ème et 15ème Air Forces et leurs escadrilles de bombardiers lourds se sont vraiment révélées être une nouvelle arme, mortelle pour nos ennemis.
NOS BOMBARDIERS ONT BRISÉ LA PRODUCTION D’ESSENCE SYNTHÉTIQUE EN ALLEMAGNE
Si, dans le courant d’une guerre totale, vous pouvez empêcher votre opposant d’avoir accès à une chose essentielle à son effort de guerre, alors vous avez gagné ! C’est cette simple constatation qui a conduit les chefs des Armées de l’Air Alliées à concentrer leur effort de bombardement sur les centres de production et les dépôts de carburant, une fois la menace de la Luftwaffe écartée. Aucune nation moderne ne peut mener de guerre sans carburant ; elle ne peut même pas combattre efficacement si l’apport de carburant devient hasardeux. En fait, une armée doit pouvoir recevoir autant de carburant qu’elle le veut et, ceci, à tout moment. Du fait de son appareil industriel très intégré, l’accès au pétrole était le point faible de la cuirasse allemande. La très grande partie du pétrole utilisé par l’Allemagne était importé.
Une telle dépendance de sources étrangères pour une ressource aussi cruciale était bien entendu inacceptable pour une nation décidée à s’auto-suffire et qui, de plus, se destinait à un expansionnisme débridé. Car l’expansionnisme est basé sur la guerre, et la guerre tend à fortement chambouler les importations de pétrole quand on est une puissance continentale enclavée ne disposant que d’une petite marine de guerre. En 1939, près des deux-tiers du pétrole consommé par l’Allemagne arrivait des Etats-Unis. Face à cette situation délicate, la réaction de l’Allemagne fut de deux ordres.
Premièrement, l’Allemagne fit appel à son génie en chimie et développa une industrie de production de carburant synthétique à partir des tonnes de charbon de basse qualité qu’elle extrayait de ses importantes mines. Le charbon et le pétrole sont tous les deux composés de molécules fortement apparentées, les hydrocarbures. L’ingéniosité chimique inégalée des allemands avait déjà produit deux méthodes de production d’essence synthétique à partir du charbon : le procédé Fischer-Tropach et le procédé Bergius. Ces deux procédés étaient efficaces, avec un bon rendement, mais coûteux. Le carburant ainsi fabriqué revenait nettement plus cher que l’essence naturelle distillée du pétrole. Et donc la mise en route par une nation avant-guerre d’une industrie à grande échelle produisant de l’essence synthétique selon ces procédés était le signe incontestable que cette nation se préparait à la guerre. C’est ce qui eut lieu en Allemagne, trois grandes usines de production d’essence synthétique furent construites dans la Ruhr, en Silésie et près de Leipzig, à proximité des trois plus grandes mines de charbon du pays. Bien peu furent ceux à s’en rendre compte.
Deuxièmement, l’Allemagne s’attacha à un gros effort politique et militaire pour son indépendance vis-à -vis de ses importations de pétrole. De fait, dès 1941, quand les fumées de sa conquête de toute l’Europe continentale se furent dissipées, il apparut que l’Allemagne avait un libre accès à tous les champs de pétrole d’Europe, notamment ceux de la Roumanie, son alliée. En incluant tous les champs pétrolifères des nations annexées, l’Allemagne pouvait ainsi compter sur une production annuelle théorique de 27 750 000 tonnes d’essence (près de 211 millions de barils). Dans les faits, tout ce tonnage ne pouvait pas être distillé en une essence à haut indice d’octane comme le demandait son armée. En effet, les raffineries conquises étaient un fatras d’installations toutes basées sur des technologies différentes d’une nation à l’autre, et la plupart de ces installations étaient anciennes, voire très anciennes.
Les raffineries les plus récentes étaient toutes localisées loin des champs pétrolifères les plus productifs. Il n’y avait que très peu de pipeline en Europe et les lignes de chemin de fer étaient le plus souvent très indirectes entre les champs pétrolifères et les raffineries. Il fallait donc que le conquérant allemand y mette de l’ordre et de l’homogénéité. Tout cela lui demanda du temps, or c’est le temps qui allait bientôt manquer à l’Allemagne. En plus de ces inconvénients, l’Allemagne devait tenir compte des sabotages des réseaux locaux par la résistance et de la très mauvaise volonté des employés des raffineries conquises. C’est ainsi qu’en1943, la production totale en essence du Reich n’était que de 16 500 000 tonnes (125 millions de barils). Et sur ce chiffre, 7 millions de tonnes provenaient du charbon dans les usines d’essence synthétique allemandes, soit près de 42 %. Le reste provenait de la distillation du pétrole, les 2/3 des champs pétrolifères roumains à Ploesti. La production d’essence continua à ce taux toute l’année de 1943 et au début de 1944, permettant aux stocks de l’armée allemande de progresser de 3 millions de tonnes à l’été 1943, à près de 4 millions de tonne en avril 1944.
En mai 1944 commença notre campagne de bombardements stratégiques des centres de production et de dépôts d’essence en Allemagne, nous visions 24 usines de production d’essence synthétiques et 83 raffineries dans toute l’Europe. La grande majorité des cibles se trouvaient concentrées dans six districts géographiques uniques, un premier dans la Ruhr, un second en Silésie, un troisième à Leipzig, un quatrième dans le district Hambourg-Hanovre, un cinquième était un vaste complexe de raffinerie dans la banlieue de Vienne et le sixième était le champ pétrolifère de Ploesti en Roumanie. Le commandement divisa ces six objectifs en deux groupes de trois. À la 15èmeAir Force fut assignée les objectifs de Silésie, Vienne et Ploesti ; à la 8ème Air Force les trois autres. On commença immédiatement ! Rien qu’en mai 1944, onze cibles furent attaquées et certaines des cibles retenues furent bombardées jusqu’à trois fois de suite. En juin 1944, un total de 43 missions de bombardement furent lancées contre ces cibles. Le Haut-Commandement allemand qui, à l’époque, faisait face à une vaste offensive russe sur le front de l’est et devait aussi combattre nos troupes débarquées en Normandie, se trouva tout à coup privé de près de la moitié de ses ressources en carburant du fait de nos bombardements. L’armée allemande commençait à être paralysée et, pour la première fois de la guerre, elle voyait sa puissance combative fortement impactée. Ses réserves de carburant, qui étaient encore de 4 millions de tonnes en avril, devenaient tout à coup si basses que c’en était alarmant. Mais ce n’était que le début.
En juillet 1944, la production d’essence n’était plus qu’un tiers celle du mois d’avril, deux tiers en moins en trois mois seulement ! En septembre 1944, les champs pétrolifères de Ploesti qui avaient été détruit à 90 % par les bombardiers de la 15èmeAir Force, étaient capturés par l’Armée Rouge. Du coup, les bombardiers de la 15ème Air Force se focalisèrent sur les seuls objectifs de Silésie et de Vienne qui subirent bombardements sur bombardements. En septembre 1944, la production d’essence en Allemagne tomba à seulement un cinquième de ce qu’elle était en avril. L’ennemi, maintenant aux abois, voyait sa production diminuer constamment alors que la demande de son armée était toujours au plus haut à cause des deux fronts sur lesquels elle luttait. Sa tête était dans les mâchoires du tigre allié ! La Luftwaffe surtout mourait « de soif », les avions étaient là mais ils ne pouvaient pas prendre l’air du fait de l’absence de carburant ! La formation des nouveaux pilotes était réduite à la portion congrue du fait du manque de carburant, et ces jeunes pilotes étaient lancés immédiatement au combat sans avoir reçu de formation, des combats où ils ne faisaient pas de vieux os. Les pertes de la Luftwaffe en homme et en matériel devinrent intolérables.
Figure 10. Traduction du titre : production mensuelle de carburant en Allemagne. Figure de gauche : Mars 1944, 1,344 millions de tonnes. Figure de droite : Avril 1945, 99 000 tonnes. Traduction de la légende : Les guerres modernes ont pour enjeu le pétrole. Notre succès dans les bombardements des centres de production de carburant de l’Allemagne a été déterminant.
Il y avait trois choses que l’ennemi devait faire dans une telle situation. Il les fit en les poussant aux limites du possible. D’abord, il devait assigner les rares avions en état de vol dans la Luftwaffe à la défense de ses centres de production d’essence synthétique ; c’est ce qu’il fit immédiatement. Deuxièmement, il devait protéger ces mêmes centres industriels avec une flak la plus dense possible ; c’est ce qu’il fit. Enfin, il devait donner la priorité à la remise en état la plus rapide possible des centres bombardés. C’est ce qu’il fit avec une obstination et une ingéniosité qui nous étonnent encore actuellement. Mais après chacune de nos attaques, le travail de remise en état devint de plus en plus difficile et de plus en plus long. Dès que nos reconnaissances aériennes, incessantes, révélait que l’usine reprenait son activité, même partiellement, alors nous envoyions aussitôt une nouvelle vague de bombardiers. Ce devait être bien frustrant pour les ingénieurs allemands en charge des reconstructions. Ceux que nous avons capturés n’ont pas été bien bavards sur ce sujet. On en aura une petite idée avec ce mémo d’encouragement en date du 17 septembre 1944 que le Ministre du Reich Speer envoya à tous les responsables d’usines. Voilà ce qu’on peut y lire :
"L’idée se répand parmi nous qu’il serait totalement inutile de réparer les centres de production d’essence synthétique bombardés puisque, chaque fois que nous commençons les réparations, l’ennemi revient bombarder et détruire ce que nous avons eu tant de mal à reconstruire. (Suit une liste des centres qui vont être réparés, les nouvelles usines qui vont être enterrés, ainsi que l’espoir que le mauvais temps vienne empêcher les bombardiers alliés de faire leur besogne) (..) Il est donc totalement illusoire de penser que ces reconstructions sont sans espoir. Bien au contraire, elles sont absolument vitales sur le long terme même, même s’il faut les recommencer sans cesse. En dernière analyse, la poursuite de la guerre vers la victoire finale dépend entièrement de cet effort.
Heil Hitler !
Speer"
Et quand le mauvais temps s’invita pendant les mois d’hiver 1944-1945, la situation désespérée de ces industries allemandes s’améliora sensiblement. Cependant, les stocks de carburant ne s’étaient pas reconstitués et les opérations militaires effectuées par la Luftwaffe et par la Wermacht étaient de plus en plus dictées par l’approvisionnement en carburant disponible et de moins en moins par les nécessités militaires du terrain. L’Allemagne se désagrégeait. En février 1945, les Russes capturaient les usines de Silésie. Des bombardements massifs dévastaient les usines de Leipzig et de Hambourg. La Ruhr était envahie par nos troupes. La production totale de carburant en mars1945 pour l’Armée allemande tomba à un dixième de ce qu’elle était un an plus tôt, et en avril 1945 elle n’était plus que 5 % de ce qu’elle était un an plus tôt. La partie était terminée. L’Allemagne était à terre.
Figure 11. Traduction de la légende : L’usine Buer à Scholven était l’une des deux usines de production de carburant synthétique localisées à Gelsenkirchen dans la Ruhr. D’août 1944 à la fin de la guerre, ces deux usines subirent 14 mission de bombardements par la RAF avec un total de 9 445 tonnes de bombes larguées, et 13 missions de bombardements de l’USAAF avec un total de 2 855 tonnes de bombes larguées. Les deux usines furent rasées jusqu’aux fondations. Sur cette photographie de l’usine de Scholven, on voit que seul l’abri anti-aérien (la tour en forme d’obus en haut à gauche) a survécu sans grands dommages aux bombardements répétés.
Figure 12. L’une des ruses inventées par les Allemands pour nous tromper a été de camoufler les usines et de construire de fausses usines. Ainsi, les bombardiers de la 15ème Air Force sont allés bombarder une usine Skoda que la reconnaissance avait repérée à 5 km de Pilsen. C’était une usine bidon. Au fur et à mesure de la guerre, l’expérience de nos experts dans l’analyse des photographies de reconnaissance aérienne s’aiguisa, et ce genre d’astuces devint de moins en moins efficace pour les Allemands. Néanmoins, pendant toute la guerre, il y eut ponctuellement des méprises de la part de nos bombardiers, surtout lors de l’excitation des attaques d’objectifs secondaires.
Fin de la Partie III ... À suivre !
ouaf ouaf ! bon toutou !!
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La suite et la fin de ce long document de 1945 ... Partie IV
NOS BOMBARDIERS ONT BRISÉ LES TRANSPORTS ALLEMANDS
Les transports sont des cibles particulières en ce sens qu’ils sont des objectifs stratégiques et tactiques tout à la fois. Notre campagne de bombardement des moyens de transport ennemis commença comme une campagne d’attaques uniquement tactiques mais, très vite, des moyens stratégiques furent aussi engagés. En effet, seul le quart des moyens ferroviaires allemands étaient utilisés pour des transports militaires. Ils ne constituaient donc pas un objectif prioritaire. Cependant, très vite, nous apprîmes que près de la moitié du transport ferroviaire allemand servait directement l’effort de guerre industriel. C’est cette constatation qui nous fit engager nos bombardiers lourds sur les gares et entrepôts ferroviaires de l’Allemagne. De plus, comme les transports militaires étaient prioritaires, toute réduction de la capacité de transport ferroviaire impacterait directement l’effort industriel en le reléguant derrière les transports militaires.
À cette analyse globale, d’autres éléments s’imposaient pour lancer des attaques stratégiques. Le système ferroviaire est particulier avec de très nombreuses faiblesses face aux bombardements. C’est un système industriel absolument vital pour toute l’économie, à la fois la civile et la militaire. On ne peut pas disperser ou mouvoir les gares et les entrepôts ferroviaires. Ce sont des objectifs de très grande taille, facilement repérables et difficilement défendable par l’artillerie anti-aérienne. On ne peut pas camoufler les gares. On ne peut pas enterrer les gares. Il y a tant de grandes gares dans un pays que même par mauvais temps, il y aura toujours une gare attaquable ici ou là . Les gares sont de tailles très variées et peuvent donc être attaquées par des avions de différents types tout à la fois. Même des chasseurs peuvent effectuer des passes de mitraillage efficaces sur des petites gares. Une grande gare fortement endommagée peut momentanément transférer ses transports sur la route ou sur des canaux si nécessaire, mais les capacités perdues ne peuvent être compensées par d’autres installations intactes ailleurs, comme dans le cas de certaines industries lourdes. Enfin le coût de reconstruction d’installations ferroviaire est très élevé, bien plus que celui d’usines. Et donc, pour l’assaillant, le coût de revient d’une attaque de bombardiers est particulièrement rentable quand il s’agit d’attaquer des installations ferroviaires.
De mars 1944 à avril 1945 nos bombardiers lourds et ceux de la RAF déversèrent 400 000 tonnes de bombes sur les gares du Reich. La grande mélancolie des employés des Deutsche Reichsbahn, qui frappa tellement les esprits de nos soldats qui envahirent l’Allemagne, y trouve certainement sa source.
NOS BOMBARDIERS ONT BRISÉ LES AUTRES INDUSTRIES ALLEMANDES
À l’occasion, nos bombardiers frappèrent d’autres industries que les "Trois Grandes" (The Big Three) : le carburant, les transports, l’aéronautique. Avant 1944, nos forces aériennes n’étaient pas suffisamment nombreuses pour envisager d’attaquer autres choses que les trois cibles principales. Nos bombardiers ne pouvaient pas se permettre de pénétrer profondément l’espace aérien allemand sans dommages excessifs. Par conséquent, les planificateurs choisissaient des cibles à relativement courte portée, ou bien des cibles suffisamment grandes pour que les bombes larguées fassent de gros dégâts à coup sûr. En 1942 et 1943, nous n’avions pas tellement d’autres choix.
Le meilleur exemple de ceci fut la mission sur Schweifurt qui regroupait trois grandes usines de roulement à billes qui à elles seules produisaient près des deux-tiers de tous les roulements à billes utilisés en Allemagne. Elles furent bombardées à deux reprises, en août et octobre 1943 lors de raids épiques. Malheureusement, le seul raid du 14 octobre vit 60 bombardiers abattus sur 291 B-17 participants. 17 autres B-17 étaient tellement endommagés qu’au retour ils furent immédiatement ferraillés. 121 autres B-17 étaient fortement endommagés. 198 bombardiers sur 291 avaient été mis hors de combat, définitivement ou temporairement, en une seule mission. 650 hommes sur 2 200 manquaient à l’appel au retour. De telles pertes étaient inacceptables, il fallut donc annuler toute mission de bombardement en profondeur sur le territoire allemand. En fait, ces pertes furent tellement élevées que la 8ème Air Force resta à l’arrêt pendant quatre mois à la suite de cette mission avant de reprendre les bombardements. Les usines de Schweifurt furent fortement endommagées mais la production reprenait au même niveau seulement deux mois après le bombardement.
Il fallut donc attendre. Pendant ces quatre mois d’arrêt des missions, on développa le système d’escorte des bombardiers par des chasseurs échelonnés à long rayon d’action. En janvier 1944, le nouveau système d’attaque était prêt, et c’est de cette période que date le début de la fin pour l’industrie allemande.
NOS BOMBARDIERS ONT BRISÉ LES PORTS ET LES DOCKS ALLEMANDS
Durant les premiers mois de 1943, quand la bataille de l’Atlantique faisait rage et que cette partie de l’océan se recouvrait des épaves de nos bateaux coulés par les U-boats, les bases de sous-marins allemands devinrent une nouvelle cible prioritaire. En plusieurs missions, la 8ème Air Force endommagea fortement douze bases de sous-marins, dont les principales en France. Même si chaque mission ne comportait pas un très grand nombre de bombardiers, les 2/5 du tonnage largué en 1943 par les appareils de la 8ème Air Force le fut au-dessus de bases des U-boat. En 1943, la RAF largua le cinquième de toutes ses bombes au-dessus de ces mêmes bases. Comme la RAF possédait une plus grande flotte de bombardiers que nous à l’époque, le tonnage total largué par la RAF fut bien supérieur au nôtre. Les bombardements de la RAF en 1943 au-dessus de Hambourg, Kiel, Brême et Wilhelmshaven firent de gros dommage non seulement aux installations portuaires mais aussi aux chantiers navals qui y fabriquaient des U-boats.
Mais la guerre sous-marine menée directement au-dessus des meutes d’U-boats dans l’Atlantique Nord commença à s’avérer payante et les bases de sous-marins disparurent de nos cibles prioritaires dès l’été 1943. Cependant, nos bombardiers retournèrent au-dessus des bases de sous-marins en 1944 et en 1945, cette fois avec beaucoup plus d’effets du fait de l’utilisation de bombes spéciales conçues pour percer des couches épaisses de béton.
Figure 13. Traduction de la légende : A l’époque où la menace des sous-marins nazis était maximale en Atlantique et qu’ils envoyaient par le fond des centaines de millier de tonnes de nos navires, les chantiers navals de construction des U-boat devinrent un objectif prioritaire pour nos forces de bombardement. Voici ce qui reste de deux U-boat après un bombardement de leur abri par la RAF avec des bombes spéciales capables de percer 4 mètres de béton armé. Quand la guerre anti-sous-marine commença à faire effet, le bombardement des abris de sous-marins ne fut plus prioritaire.
NOS BOMBARDIERS ONT BRISÉ LES CITÉS ALLEMANDES
Les bombardements des usines de production d’essence synthétique ont pu étrangler les armées allemandes, ceux des moyens de transport ont pu étrangler l’industrie allemande, mais ce qui a affecté le plus l’état d’esprit combatif de la nation allemande ce sont les bombardements massifs de ses villes. Ceci fut l’ouvrage de la RAF. En 4 ½ ans, la RAF y a consacré un total de 430 614 tonnes de bombes, dont 64 000 pour les seuls trois premiers mois de 1945. Dans toutes les principales villes allemandes, les centres villes, surtout, ne sont plus que des amas de ruines. Le simple travail de dégagement des décombres est un travail qui occupera les allemands pendant des mois voire même des années.
Notre analyse montre que ces bombardements massifs ont causé deux sortes de dommages. Il y a d’abord les dommages causés aux bâtiments, souvent avec des piles de gravats qui montent jusqu’au deuxième étage des rares murs encore debout ici ou là . Il y a ensuite les dommages causés par les incendies, sur une échelle jusque-là inégalée. Dans toutes les grandes villes allemandes, mais surtout à Berlin, à l’exception notable de trois églises, tous les toits et tous les planchers de tous les bâtiments ont brûlés et leur cendres et débris sont tombés au rez-de-chaussée. Seuls les murs restent debout comme des sortes de squelettes géants. Voilà le spectacle de chaque ville allemande aujourd’hui, sans exception, des murs vides de tout étage ou des ruines en amas ou, le plus souvent, les deux en même temps. Notre ennemi l’a mérité, ne l’oublions pas. Le plus souvent, les transports en commun sont encore totalement à l’arrêt, l’électricité absente, l’eau courante disparue, les lieux de travail détruits, la main d’œuvre désœuvrée voire même en attente d’hospitalisation. Notre ennemi l’a mérité, ne l’oublions pas.
La population civile allemande est désormais totalement inoffensive car impuissante. Notre ennemi l’a mérité, ne l’oublions pas. Ce n’est pas la RAF qui a inventé les bombardements massifs des villes et des civils. C’est la Luftwaffe lors de la campagne de la bataille d’Angleterre en 1940 qui l’a mis en pratique pour la première fois à grande échelle. Les minables petits allemands auraient mieux fait d’y regarder à deux fois avant d’aller titiller les grands !
Figure 14. Traduction de la légende : Les villes en ruine de l’Allemagne témoigne de l’impressionnante dévastation menée par nos bombardiers, on peut penser que cette seule dévastation aurait suffi pour mettre le peuple Allemand à genoux. Mais, non, notre Renseignement en Allemagne occupée montre que ce n’est pas la destruction de leurs villes, mais bien plutôt la destruction froidement planifiée de leurs centres industriels qui a gagné cette guerre, en entravant la volonté de se battre de tous les Allemands.
COÛTS ET PROBLEMES DES BOMBARDEMENTS STRATÉGIQUES
Jusqu’ici, le lecteur aura compris, combien fut efficace le choix des objectifs prioritaires pour les bombardements stratégiques dans la chute de toute l’économie allemande et, par là , dans l’immobilisation de l’armée allemande qui fut, rappelons-le, la plus puissante des armées du Monde jusqu’en 1942. Le lecteur est maintenant en droit de savoir quel fut le coût pour notre nation de parvenir à ravager autant la nation ennemie.
Le coût total des actions menées en Europe de 1942 à 1945 par notre Force Aérienne, estimé par le Bureau fédéral du Budget, est de 27, 5 milliards de dollars (Soient 335 milliards d’euro de 2019). Aucun chiffre semblable n’est disponible du côté des Britanniques. La mise en œuvre des 8ème et 15ème Forces Aériennes de l’AAF, au moment de leur pleine puissance à l’été 1944, utilisait 258 250 officiers et hommes du rang. Les chiffres officiels des pertes en homme ne sont pas encore disponibles. Mais cette guerre fut aussi une réussite économique difficilement chiffrable sur le plan technologique, notamment dans le domaine de l’électronique embarquée.
Mais commençons notre analyse par l’estimation du coût d’un bombardier lourd envoyé depuis sa sortie d’usine aux États-Unis jusqu’au théâtre européen des opérations et jusqu’à ce qu’il soir retiré du service actif ou perdu en combat. Prenons l’exemple d’un B-24 Liberator. L’appareil nu coûte à l’achat 115 300 $ (1,4 millions euros de 2019), les hélices coûtent 4 200 $, l’équipement électronique de combat, notamment le viseur électronique, coûte 50 000 $ (presque la moitié du coût de l’avion en sortie d’usine à lui seul), l’armement en mitrailleuses revient à 3 200 $, les instruments de vol et de communication exigés par l’armée coûte 8 500 $. Total pour un B-24 équipé: 213 700 $ (2,65 millions d’euro 2019). Pour qu’il rejoigne son théâtre d’opération, il est nécessaire que la Ferrying Division des AAF (Division de Livraison du Matériel de l’USAAF) transfère ce Liberator de son usine de fabrication à l’Angleterre au-dessus de l’Océan Atlantique. Par le chemin le plus court, il fallait 23 heures de vol depuis les usines Consolidated de Detroit à l’aérodrome principal de Glasgow-Prestwick en Écosse. En se basant sur une consommation horaire de 210 gallons de carburant par heure de vol pour un Liberator en vitesse de croisière, la mission de livraison du B-24 neuf à son unité opérationnelle en Angleterre coûtait en moyenne 1 100 $. En 1944, la durée de vie moyenne d’un bombardier lourd en opération était de 237 jours, soient 650 à 700 heures de vol en mission de guerre. Ces 700 heures de vol consommaient à nouveau 32 602 gallons de carburant. Sans compter les autres fluides et les huiles lubrifiantes. Le Bureau des Statistiques de l’AAF a calculé qu’un total de 1,25 milliards de gallons de carburant ont été utilisés par les 8ème et 15ème Forces Aériennes pendant la durée de la guerre sur le théâtre européen (Soient 4,7 milliards de litres).
Chaque appareil était fortement endommagé lors d’une mission pendant ses 237 jours de vie active, le plus souvent plusieurs fois. Il fallait donc qu’il rejoigne un hangar pour y être remis en état de combattre. En effet, le Bureau des Statistiques montre qu’entre avril 1944 et mai 1945, les hangars de réparation des bombardiers lourds en Écosse ont remis en état un total de 61 294 bombardiers qui avaient été fortement endommagés en mission, soit plusieurs fois le même nécessairement. Il a été ainsi calculé qu’en moyenne, chaque bombardier lourd de l’AAF au cours de ses 237 jours de combat, passaient 7 jours en usines de réparations lourdes en Écosse et 34 jours en réparation sur sa base. Il était donc, en moyenne, en service actif seulement 196 jours sur 237.
Les statistiques de combat montrent qu’en moyenne à chaque mission, un bombardier sur 5 était touché par la flak avec des dommages sérieux à la clef. Il était en effet heureusement très rare qu’un tir direct de la flak abatte un bombardier lourd. Il arrivait aussi assez souvent que dans la chaleur du combat, des dégâts importants soient infligés à un avion par ses propres mitrailleurs, notamment sur les dérives, et, surtout, par le feu des autres bombardiers l’environnant. Dans certains cas, heureusement exceptionnels, cela a conduit à la perte d’avion. En prenant le coût total des réparations sur ces 237 jours de vie d’un bombardier, on aboutit au total de 53 400 $ pour notre Liberator, soit le quart de son coût d’achat (Soient 650 000 euros de 2019).
Il faut maintenant prendre en compte le changement régulier des moteurs. Dans les jours de vent de sable, un moteur Wright R-1820 de B-17 de la 15ème Air Force en Afrique du Nord devait être changé toutes les 15 heures de vol ! Pratiquement après chaque mission. Il a été calculé que sur le front européen, un Liberator avait ses quatre moteurs changés tous les mois soit au moins huit fois durant les 237 jours de sa durée de vie en combat, soit un coût supplémentaire de 60 000 $ (Soient 730 000 euros de 2019).
Nous en sommes déjà à un coût total d’un tiers de million de dollar pour chaque bombardier (un peu plus de 4 millions d’euro 2019). Multiplier cette somme par 15 600, le nombre total des bombardiers lourds livrés aux 8ème et 15ème Air Forces durant la guerre, et vous obtiendrez la bagatelle de 5,2 milliards de dollars (63 milliards d’euro 2019). A cela, vous devrez ajouter le coût d’achat et d’utilisation, en carburant notamment, des 18 000 chasseurs affectés à ces deux forces aériennes sur le théâtre européen. Le prix d’achat moyen d’un P-38, d’un P-47 ou d’un P-51 est similaire, à savoir 83 000 $ l’unité (de l’ordre de 1 million d’euros de 2019).
Dans le calcul effectué jusqu’à présent, on n’a pas tenu compte de certains postes de dépenses. A savoir, la formation des pilotes, des bombardiers, des navigateurs et des mitrailleurs, la maintenance des avions, la construction d’aérodromes, la maintenance des installations aéroportuaires, la recherche aéronautique, la nourriture et l’équipement du personnel, les transports, les salaires et, enfin, les munitions et les bombes.
Tout pris en compte, les services du Secrétariat du Budget des États-Unis ont pu calculer que cette somme de 27,5 milliards de dollars dépensée pour la campagne de bombardement stratégique en Europe ne représentait que 11% de la somme totale dépensée au 31 décembre 1944 par les États-Unis pour mener la guerre sur les deux théâtres d’Europe et du Pacifique. Au 31 décembre 1944, les États-Unis avaient dépensés la somme totale de 250 milliards de dollar pour mener la guerre (NdT - 3 050 milliards d’euros 2019). Un point essentiel doit être noté cependant, la guerre de bombardement stratégique en Europe a coûté bien plus à l’ennemi qu’à nous.
L’utilisation des bombardiers lourds en Europe a rencontré des difficultés opérationnelles inattendues, comme la météo par exemple. La maintenance des bombardiers lourds en Europe a dû faire face à la boue, la pluie, le brouillard, les températures en dessous de 0°C. Sur le théâtre méditerranéen, c’était le sable en Afrique et la chaleur excessive. Mais l’excellente qualité des installations aéroportuaires en Angleterre a grandement facilité la tâche de la maintenance. C’était en revanche une tout autre histoire en Italie lors des temps pluvieux. Dès qu’un avion quittait les surfaces dures, il s’embourbait. Les pertes en avion étaient augmentées car dès qu’un bombardier endommagé atterrissait et quittait la piste, c’était pour s’enfoncer dans la boue et y rester coincé. Un autre problème de cette boue, plus vicieux, était son infiltration dans le moindre recoin des avions, même en bon état. La boue allait colmater les câbles et les poulies de rappel, ou encrassait les connecteurs électriques causant des pannes à répétition. La boue s’accumulait dans les trains d’atterrissage, colmatait les viseurs et la caméra de bord et allait même encrasser les tubes des mitrailleuses. Les conditions de travail pour nos mécanos sur nos bases en Italie étaient alors vraiment difficiles.
Les précipitations, la pluie ou la neige, n’ont que peu d’influence sur les opérations militaires. Mais elles influencent fortement le travail du personnel au sol, le rendant presqu’impossible quelquefois. Le givre en hiver était un ennemi particulièrement sournois, tout pilote sait que le givre qui se dépose sur les surfaces portantes de son avion est un danger très grave. Avec nos collègues anglais, nous développâmes un gel liquide particulier qui, appliqué sur les avions, empêchait la formation de givre et retardait son apparition. Du coup, nos bombardiers lourds purent décoller et attaquer le territoire ennemi, même lors des jours de grand gel. Le gel était surtout un problème lors du vol d’un bombardier lourd. C’est ainsi que souvent, en hiver, notre personnel de bord le plus exposé au froid, le mitrailleur de la tourelle ventrale et le mitrailleur de queue, devaient opérer au-dessus de l’Allemagne par des températures de -45 °C. Au cours de l’hiver 1944-1945, le froid fut tel dans le sud de l’Allemagne et en Italie que les bombardiers de la 15ème Air Force furent tous confinés au sol dix jours de suite. Parmi les plus de 9 000 bombardiers lourds perdus en opération, 1 097 le furent pour des « raisons autres que le combat ». C’est sans aucun doute parce qu’ils rencontrèrent en vol des conditions météo très dégradées.
Si difficile qu’il était de voler dans de telles conditions météo pour un bombardier lourd, ça l’était encore plus pour les chasseurs d’escorte. Ceci est d’abord dû au fait que le vol aux instruments est d’autant meilleur que les instruments sont stables. Plus l’avion est gros et plus il est stable dans les turbulences. Un chasseur est un petit avion qui, de plus, est construit avec un certain degré d’instabilité voulue pour le rendre beaucoup plus réactif en combat rapproché. Une atmosphère agitée ou des petites maladresses dans son pilotage n’auront que peu d’effet sur les 25 tonnes d’un B-24, mais elles en auront un très grand sur un chasseur avec le risque, si le pilote n’y prend pas garde, de pousser l’avion dans une attitude de vol dangereuse. Enfin, le réglage des compensateurs, si important pour le vol aux instruments, est difficile à caler avec un chasseur monomoteur à cause de l’effet de couple du moteur.
Mais, l’un dans l’autre, la flotte des bombardiers retrouvait son escorte à l’endroit et à l’heure prévus lors du briefing presque toujours. Souvent en hiver, la rencontre se faisait avec un mile de visibilité horizontale et 1 000 pieds de visibilité verticale, et, ceci, grâce à un vol aux instruments maîtrisés à la fois par les pilotes de bombardiers mais aussi par les pilotes des chasseurs. Quelquefois, la couche nuageuse culminait à 28 000 pieds, malgré cela les missions étaient effectuées. Quand la couche nuageuse était aussi épaisse, une méthode particulière était utilisée pour le convoyage des chasseurs d’escorte vers leur rendez-vous avec les bombardiers. Les chasseurs volaient par groupe de quatre, un leader et trois ailiers. C’est le leader qui faisait tout le travail de navigation et de vol aux instruments, les ailiers devaient suivre au plus près. Et quand on dit au plus près, ce n’est pas ici une figure de style. Très souvent, la visibilité était tellement mauvaise que les quatre avions devaient superposer leurs ailes à moitié pour conserver un contact visuel avec l’avion du leader. Dans certains cas, un ailier inexpérimenté pouvait, dans ces conditions ardues, perdre de vue momentanément le groupe. A la vitesse de 600 km/h, il se trouvait alors immanquablement perdu et la panique s’ajoutant à la perte de repères visuels, faisait le reste. L’avion du malheureux pilote partait en vrille et il allait au tapis. Hélas, de nombreux jeunes pilotes inexpérimentés furent ainsi perdus lors de leur toute première mission en hiver.
Quelquefois, les pilotes revenaient d’une mission au-dessus de l’Allemagne pour s’apercevoir que leur base était recouverte d’un brouillard typiquement Anglais, bien épais. Et là aussi, l’ingéniosité des Anglais apportait la réponse. Ils avaient développé la méthode FIDO (Fog Intensive Dispersal Of = Dispersion Intensive du Brouillard) qui utilisait des brûleurs alimentés par de l’essence alignés de part et d’autres des pistes. Les brûleurs réchauffaient suffisamment l’air au-dessus des pistes pour condenser le brouillard et augmenter très nettement la visibilité lors des atterrissages. En outre, les bombardiers étaient guidés par un signal radio pour l’alignement et la pente de descente vers la piste. Ce sont ces deux dispositifs qui nous ont permis, malgré l’extrême mauvais temps et les brouillards quais-permanents, de continuer à bombarder les lignes d’approvisionnement de l’armée de Von Rundstedt pendant la Bataille des Ardennes durant l’hiver 1944.
La mauvaise météo nous a quelquefois obligé à abandonner une mission de bombardement alors qu’elle était déjà en route, voire même arrivée au-dessus de son objectif. Si la couche nuageuse était impénétrable, alors il fallait abandonner la mission. Pour éviter une telle perte de temps, une nouvelle mission a été affectée aux chasseurs d’escorte. Une partie d’entre eux commençait sa mission en allant loin devant les bombardiers jusqu’à l’objectif pour reconnaître la météo sur place. Cette petite escadrille de reconnaissance était constituée de chasseurs pilotés uniquement par des pilotes de bombardier reconvertis. Ces hommes, des experts du bombardement avec déjà de nombreuses missions de bombardement à leur actif, allaient survoler l’objectif et contactaient par VHF les commandants des escadrilles de bombardiers qui suivaient loin en arrière sur l’état de la météo au-dessus de l’objectif et sur les meilleures approches à suivre pour les passes de bombardement. Les chasseurs de la Luftwaffe, concentrés sur les bombardiers, laissaient généralement très tranquilles ces petites formations de reconnaissance. Voici le témoignage d’un commandent de Groupe de Bombardement de la 8ème Air Force au sujet de ces formations de reconnaissance :
"Les Forces de Reconnaissance Avancées nous permettaient de savoir longtemps à l’avance les informations vitales de ce qui nous attendait au-dessus de notre objectif. Très souvent, leurs renseignements nous ont conduits à changer notre route ainsi que notre altitude de croisière pour suivre une nouvelle route beaucoup plus sûre. A plusieurs reprises, ils nous ont même annoncé que ce qui nous avait été donné au sol comme des couches nuageuses très denses, étaient, en fait, des couches très fines."
En conclusion, dans les derniers mois de la guerre sur le théâtre européen, tous les obstacles de l’ennemi avaient été surmontés, sauf un : la Flak, qui est restée puissante et dangereuse jusqu’à la fin.
FIN DE CE TEXTE
ouaf ouaf ! bon toutou !!
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Je n'ai pas encore tout lu ( je me reserve pour ce soir ) Passionné d'histoire aéronautique je te remercie de nous faire partager ce document historique qui est original pour son coté honnête à révéler les bonnes comme les mauvaises décisions durant cette époque.
Encore merci pour ce travail titanesque .
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En mai 1944 commença notre campagne de bombardements stratégiques des centres de production et de dépôts d’essence en Allemagne, nous visions 24 usines de production d’essence synthétiques et 83 raffineries dans toute l’Europe.
Churchill disait: "Nous pouvons faire confiance aux américains, ils essayeront tout avant de trouver la bonne solution."
C'est un fait que s'attaquer au carburant si tardivement à fait poser des questions après guerre, d'autant plus que personne ne s'est étonné sur le moment de trouver autant de matériel intact dans des usines en ruines. La production de matériel n'a cessé de croître au fil du temps malgré les destructions, dans les tunnels bien-sûr, mais aussi dans les ruines des usines qui bénéficiaient de fait du camouflage idéal. Seule la pénurie de carburant (air, terre, mer) aurait pu stopper avec certitude les forces allemandes, la fin du conflit l'a prouvé. Il existe d'excellentes publications sur le sujet qui évitent le côté 'America First'.
Blédina: "Essayer c'est grandir"
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Merci pour cette Ă©norme traduction !
Au 31 décembre 1944, les États-Unis avaient dépensé la somme totale de 250 milliards de dollar pour mener la guerre (NdT - 3 050 milliards d’euros 2019).
Et en dehors de :
La population civile allemande est désormais totalement inoffensive car impuissante. Notre ennemi l’a mérité, ne l’oublions pas. Ce n’est pas la RAF qui a inventé les bombardements massifs des villes et des civils. C’est la Luftwaffe lors de la campagne de la bataille d’Angleterre en 1940 qui l’a mis en pratique pour la première fois à grande échelle. Les minables petits allemands auraient mieux fait d’y regarder à deux fois avant d’aller titiller les grands !
pas de statistiques sur les victimes civiles.
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Chers amis,
Merci beaucoup pour vos retours!
cher Avance ... oui les chiffres donnés dans ce rapport sont fascinants .. c'est là qu'on voit la puissance économique des USA. Tiens? j'ai besoin de 250 milliards pour une guerre, allez zou on fonce!
D'oĂą la citation de Churchill par Nez-Haut !!!
Quant à "notre" CHURCHILL ... merci pour ton commentaire, j'espère que tu auras eu le temps de lire ce document historique. C'est assez étonnant de lire "dans le texte" ce que pensait l'armée US (via son Service du Renseignement) sur la guerre en Europe.
Quant aux nombres de victimes ...
L’un des buts recherchés était aussi bien évidemment d’éliminer définitivement la puissance de travail des travailleurs allemands en les tuant.
Tout est dit et sans pudeur! La guerre totale, c’est la guerre totale... sans fard.
Philippe
P.S. Avance, j'aime beaucoup ton avatar!!!!!
Dernière modification par philouplaine (10-04-2019 08:16:39)
ouaf ouaf ! bon toutou !!
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Encore une fois merci Philippe, c'était un bon condensé. Pour ceux que ça interresse un grand écrivain Jules Roy à été mitrailleur sur bombardier et il relate son ressenti et son mal-être lors de ces longues missions dans un livre que l'on peut trouver en poche (occasion) sous le titre "la vallée heureuse" qui était le nom donnée à la Rhur.
Dans un autre categorie David Irwing relate le bombardement de Dresde (sous ce titre) le 13 avril 45 durant 3 jours sans interruptions les Americains le jour et les Anglais la nuit ont opérés en vagues successives. Dresde trés à l'est ne présentait pourtant pas de site particulierement strategique, hormis une gare de triage la ville avait éte jusque là épagné et sa population de ce fait comportait une majorité de rèfugiés. Ce bombardement, au demeurant inutile , (bombes incendiaires Au phosphore) est toujours sujet à polémique ne fit que des victimes civiles, on ne sait pas exactement le nombre de victimes du fait de sa poulation venues de l'exterieur, ce fut une ouragan de feu durant plusieurs jours (les vagues de bombardiers qui se suivaient avaient leur cible en vue à plus de 100 km) - le nombre de victimes etaient estimé entre 50000 et 80000 en 3 jours.
- Le livre est à la fois passionnant et tres dèrangeant -
Dernière modification par CHURCHILL (10-04-2019 20:39:21)
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Oui Churchill, (lire ses mémoires, c'est très intéressant) Le livre de Irving est dérangeant. c'est aussi que ce monsieur est un fieffé révisionniste, connu et patenté.
Mais c'est aussi vrai que ces bombardements étaient critiqués dans l'état major RAF.
Dernière modification par bricedesmaures (10-04-2019 22:14:49)
L'expérience, c'est le nom que chacun donne à ses erreurs. Oscar Wilde
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Merci Philippe pour le superbe travail de traduction de ce très intéressant document qui nous montre sans fard les objectifs, pertes et état d'esprit de l'époque.
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Oui Churchill, (lire ses mémoires, c'est très intéressant) Le livre de Irving est dérangeant. c'est aussi que ce monsieur est un fieffé révisionniste, connu et patenté.
Mais c'est aussi vrai que ces bombardements étaient critiqués dans l'état major RAF.
Ce n'est pas un scoop la "mauvaise" réputation d´Irwing est connu, il a été correct dans ses premiers livres pour complétement partir en c.... à partir des annees 70, pour des theses revisionnistes, des ouvrages limites sur "l'innocence" d'Hitler quand à son ignorance des camp, etc .. etc. il a eu plusieurs proces qu'il a perdu, et il a aussi fait de la prison pour ces faits.
Pour en revenir à la destruction de Dresde les faits tel qu'il les relate ont été validés par de nombreux autres historien (c'etait son premier livre traduit en 63) hormis le nombre de victimes qu'il avait largement surestimé, de mémoire je crois qu'il'parlait de 135000 .
Le recensement du nombre de victimes est tres imprécis: La totalité de la ville a été un immense brasier durant plusieurs jours sans discontinuer, beaucoup de disparus carbonisés' les documents qui auraient permis d'avoir un recensement ont bien sur disparus, mais surtout il y avait de trés nombreux réfugiés dont on ne connais pas le nombre qui venaient de l'est pour fuir devant l'avance soviétique. (fevrier 45)
Dresde jusque là épargné n'avait jamais subi aucun bombardement.
Dernière modification par CHURCHILL (11-04-2019 16:00:59)
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